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LE SOCIALISME MUNICIPAL

Les élections municipales qui viennent d’avoir lieu en France, méritent de retenir notre attention. On y a vu se dessiner, au moins dans les grandes villes, une tendance du suffrage universel à délaisser les partis modérés, et à se précipiter vers les extrêmes. Paris s’est délivré de l’administration radicale socialiste qui siégeait à l’Hôtel de Ville depuis nombre d’années et l’a remplacée par une majorité nationaliste. Les socialistes et les radicaux socialistes ont perdu quelques municipalités importantes, mais ils en ont gagné d’autres : ils sont les maîtres des plus grandes villes, Lille, Lyon, Bordeaux, Marseille. La France est le premier pays où, grâce au suffrage universel, ils ont réussi à mettre la main sur un pouvoir communal aussi étendu. Mais ce serait une erreur de croire que ce qu’on appelle « le socialisme municipal, » l’application partielle des doctrines socialistes dans la commune, la tentative d’y déterminer les conditions du travail, soit spécial à la France. Il progresse dans d’autres pays, sans qu’il soit besoin de la présence dans les corps élus de socialistes consciens et militans. Ce n’est même point parmi nous, jusqu’à présent, qu’il est le plus développé. Il faut y voir une tendance générale de la démocratie urbaine, dont on saisira mieux le sens et la portée, si on l’observe dans son ensemble.


I

Lors de l’Exposition de 1889, un des hommes les plus versés dans les questions du gouvernement municipal, lui-même élu de Paris, très écouté et imposant le respect à ses adversaires socialistes, M. Léon Donnat, chargé du rapport d’économie sociale,