en bons termes avec les autorités locales, et nouait des rapports très cordiaux avec son sous-préfet, en qui il célébrait, ou peu s’en faut, un complice de cette grande œuvre. Et parmi ses « frères, » les timides étaient ainsi rassurés ; quant aux enthousiastes, ils exultaient ; et les membres d’une loge rouennaise, en 1868, unissaient leurs voix et leurs cœurs pour entonner, dans un « à-propos maçonnique, » ce joyeux couplet :
Jean Macé, frère ardent,
Pousse à la propagande
Et veut que l’on répande
Le libre enseignement.
Digne écho des Havrais,
Santallier dit : Plus de frontières,
Et prêche à tous les frères
La douce union de la paix.
Encouragé, Santallier poursuivait son rêve ; il négociait une alliance avec la Société américaine de la Paix ; il songeait à remplacer le Bulletin de l’Union par un journal, à conquérir, d’un coup, l’appui de la maçonnerie universelle par une circulaire décisive, à réunir un congrès pacifique. Dès 1868, l’Exposition maritime du Havre lui fut une occasion pour réaliser cette dernière idée. Durant deux jours de septembre, la maçonnerie de tous pays tint au Havre de secrètes assises ; les journaux locaux n’en parlèrent point ; mais Sauvestre, dans l’Opinion Nationale, fit l’indiscret ; et l’on sut, grâce à lui, que, dans cet auditoire d’intimes, Santallier avait parlé de l’Union de la Paix, et Bielefeld des rapports entre le mouvement pacifique et les progrès de l’instruction. Peu de temps après, Caubet, dans le Monde Maçonnique, se faisait l’écho des unanimes applaudissemens qui avaient récompensé le bon Santallier.
« La liberté par la paix ! » telle était la formule par laquelle Santallier mettait au premier plan l’idée de pacification et amusait les impatiens piaffemens de certains révolutionnaires trop empressés. Justement à la même époque, trois congrès suisses prenaient pour devise : « La paix par la liberté ! » et le simple renversement de la formule suffisait à faire de ces congrès trois meetings à peu près anarchistes.
Un journaliste républicain, Mangin, du Phare de la Loire, en eut l’initiative. Les liens de cordialité qui l’unissaient à M. Henri Chevreau, alors préfet de la Loire-Inférieure, assuraient à la