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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 août.


Nous n’avons pu qu’annoncer, il y a quinze jours, à l’heure tardive où elle nous parvenait, la nouvelle de l’assassinat du roi d’Italie ; et aujourd’hui il est déjà tard pour en parler comme nous l’aurions voulu. Tous les journaux ont donné des détails sur l’odieuse tragédie ; presque tous ont exprimé avec force le sentiment de réprobation qu’elle inspire. Nous disons presque tous, parce qu’il y a eu des exceptions. Sans doute, personne ne s’est égaré jusqu’à approuver le crime : on commence toujours par le condamner. Mais, cette formalité remplie, on philosophe sur le fond de l’affaire, et on en arrive volontiers à conclure que, s’il y a des régicides, c’est qu’il y a des rois. Pourquoi y a-t-il des rois ? Évidemment ils ont tort, et leur existence seule est une provocation au meurtre. Le défaut de cet argument est que les anarchistes n’assassinent pas seulement les rois : nous savons de reste que les présidens de république ne sont pas à l’abri de leurs entreprises. Ils ne ménagent pas davantage les femmes les plus inoffensives, comme l’impératrice d’Autriche. Les simples ministres, comme M. Canovas del Castillo, ne sont pas plus en sûreté que les souverains ou que les présidens. Tout ce qui sort de la foule, soit par le mérite personnel, soit par la naissance ; tout ce qui brille ou simplement reluit ; tout ce qui, pour un motif ou pour un autre, attire les regards et peut les irriter, relève de la conspiration internationale à laquelle appartiennent nresci et Saison : car Paris, comme Monza, a été le théâtre d’un autre attentat qui, grâce au ciel, n’a pas abouti. Si le poignard ou le revolver des régicides se tourne de préférence contre les rois, ce n’est pas pour ces derniers un privilège de leur rang : dans tous les gouvernemens, quels que soient leur forme et leur nom, les