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temps, à côté des œuvres exécutées par les Negroli, juste à la même époque.

C’est, en effet, la date 1541 qui se lit, avec l’inscription Philippi. Jacobi. Et. F. Negroli Faciebant sous l’orle de la rondache à la Méduse, pièce capitale entre toutes, et que nous pouvons admirer en ce moment à Paris. Celle-là est le grand chef-d’œuvre sorti de la main des hommes et jamais la toreutique n’a rien produit de plus parfaitement beau. La conservation extraordinaire de l’objet ajoute encore à son inestimable valeur. De l’avis de tous ceux qui aiment et connaissent les armes, le bouclier à la Méduse : La rodela de la Gorgona Médusa, de l’Armeria de Madrid, est le plus magnifique qui soit au monde. La simplicité de la composition, la tenue sévère, le grand parti des larges repos noirs et des décors en caissons losangiques touchés d’or et d’argent, tout semble destiné à faire valoir le masque puissant et superbe qui s’enlève, au centre, en plein relief, symbole de l’épouvante portée sur les ailes de la mort. L’artiste inconnu, qui a modelé ce masque douloureux et tragique, n’est assurément pas l’auteur d’une autre rondache de Charles-Quint où l’umbo est façonné en mufle de lion. Pour riche que soit le travail, la forme demeure un peu molle. C’est à ce bouclier que se rapporte le curieux casque de parement dont le timbre est façonné en chevelure frisée, dont la mentonnière et les jouées imitent une barbe crêpelée ainsi que les moustaches repoussées en saillie, de telle sorte que la face de l’empereur apparaissait encadrée dans leurs frisons dorés. Dans ces pièces, sorties pareillement des ateliers des Negroli, en 1533, il convient d’admirer surtout la fermeté de l’exécution et la qualité de la forge. Ces vertus maîtresses se retrouvent, d’ailleurs, dans toutes les œuvres de ces artistes milanais, même dans le casque de parement, bourguignote à l’antique, où deux figures en ronde bosse, la Renommée et la Victoire, tirent par les moustaches un Turc renversé qui forme la crête du timbre. D’une exécution sage et froide, un peu guindé et banal dans son ensemble, ce casque a le mérite, énorme, d’avoir été forgé d’une seule pièce, et cela suffit à lui assurer la première place parmi tant d’autres objets faits, fréquemment, de pièces rapportées. Souvent même les fabricans ne se gênaient pas pour laisser les joints apparens. Une rondache de parement, exécutée par Lucio Picinino, de Milan, pour Philippe III, nous en fournit un exemple. Les