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ainsi que tous ceux qui ornent les grands personnages du XVIIIe siècle. Et, détail qui a bien son prix, le peintre a, au contraire, reproduit très fidèlement les bottes du Palatin ; on en peut juger puisqu’une de ces chaussures — vraiment historiques — est exposée dans une vitrine du rez-de-chaussée. Mais je m’arrête. Aussi bien, dans cette exposition de la Hongrie, faudrait-il, en bonne justice, tout citer et raconter les faits héroïques dont témoignent tous ces harnois faussés de coups, tous ces sabres dont la lame a meurtri son tranchant sur le Turc, tous ces drapeaux dont la soie lacérée par le fer, trouée par le plomb, pend tristement le long des hampes peintes. Le temps a affaibli la vivacité des tons, calmé l’éclat des ors ; il n’a pas tari cette jeunesse éternelle du sang qui a poussé, dans le tourbillon de la charge, sur vingt champs de bataille, les chevaliers des marches du Danube, combattans obscurs et sublimes qui sont tombés, pendant des siècles, pour le salut de la chrétienté.


III

Au Petit Palais, nous nous trouvons assaillis par bien des pensées diverses. Mis en présence d’objets également disparates, mais peu nombreux et d’une sélection contestable, nous ne voyons pas jour à satisfaire notre curiosité archéologique, et aucune manifestation de grand art n’est là pour compenser cet ennui. Ce n’est plus le choix élégant et sévère de l’Espagne, ce n’est plus la profusion héroïque de la Hongrie ; c’est plutôt une petite exhibition de Musées provinciaux et de quelques collectionneurs privilégiés, qui ont été admis, par protection spéciale, à ne point se trouver confondus dans l’immense bazar qu’est l’Exposition des Armées de Terre et de Mer, à peine aujourd’hui organisée. Il ne faudrait pas croire, qu’au moins pour les armes, le Petit Palais soit organisé davantage. Depuis les armures exposées à l’entrée par le Musée d’Artillerie et prises, au petit bonheur, comme pour donner aux étrangers la plus petite idée de nos richesses archéologiques, jusqu’aux pièces semées dans des vitrines, au hasard des salles, parmi l’orfèvrerie d’église, c’est un amas confus : rudis indigestaque moles. L’étiquetage défectueux n’a même pas été fait avec une préoccupation chronologique : les attributions sont, pour la plupart, fausses. Sans parler du montage, aussi peu sincère que déplorable, de l’armure de François Ier,