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cet avis, qui ne causait à l’ambassadeur aucune surprise, ne souleva de sa part aucune objection. A quel titre, en effet, s’y serait-il opposé ? Cette exclusion n’aurait rien de plus blessant que celle dont on aurait, sans nul doute, également frappé un frère du roi d’Angleterre, un grand-duc russe, et un archiduc autrichien. Des promesses réciproques de renoncement de ce genre avaient été échangées entre les grandes puissances, au moment où elles avaient entrepris la reconstitution encore inachevée du royaume de Grèce, et l’acte officiel qui en avait constaté le témoignage portait le nom significatif de protocole de désintéressement. Nulle difficulté à suivre la même voie pour le nouveau royaume, inauguré exactement dans les mêmes conditions : aucun dissentiment d’ailleurs ne paraissait séparer sur ce point la France et l’Angleterre. Si les deux gouvernemens eussent eu l’un dans l’autre la confiance complète que semblait commander la communauté de leurs intentions, leur accord aurait suffi pour prévenir le fâcheux malentendu qui n’allait pas tarder à tout compromettre.

Voici, en effet, la complication grave qui se produisit, grâce, en réalité, à une conduite véritablement inexplicable de l’Angleterre. Le refus, dont Louis-Philippe avait fait part aux envoyés belges qui étaient venus le trouver, causait (on devait s’y attendre) une vive déception à Bruxelles, principalement chez les membres du parti avancé, qui avaient cherché à se procurer, par l’avènement du prince français, une protection dont ils comptaient user, à tout événement, dans le sens de leurs plus ambitieuses espérances.

Dans l’accès de mauvaise humeur qui suivit ce mécompte, on chercha un moyen, soit de forcer la résistance du gouvernement français (dont, vu le débile tempérament du ministère, on pouvait encore se flatter d’avoir raison), soit de se passer de la France elle-même, comme de tout le monde, au cas où elle paraîtrait décidée à ne pas se séparer de la coalition formée pour enlever à la Belgique l’indépendance de son choix ; et ce moyen, on crut l’avoir trouvé en suscitant une candidature nouvelle à laquelle personne jusque-là n’avait songé : celle d’un jeune prince, héritier d’Eugène de Beauharnais, ce fils de Joséphine à qui Napoléon avait témoigné une affection toute paternelle, et qui avait gouverné en son nom l’Italie pendant plusieurs années en qualité de vice-roi.

Eugène, on le sait, avait obtenu, grâce à ce tout-puissant