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violente et de lutte à outrance contre les étrangers. Le manifeste de l’Impératrice du 21 novembre 1899[1] ne laissait subsister aucune équivoque : « Que le mot paix ne tombe jamais de la bouche de nos grands dignitaires ! Qu’ils ne permettent jamais à une telle pensée d’effleurer un moment leur esprit ! Lorsqu’on a un pays comme le nôtre, avec un territoire aussi immense, de telles ressources naturelles, des centaines de millions d’habitans, si chacun tient à prouver son loyalisme et son patriotisme, qui peut avoir peur de l’étranger ? Que personne donc ne songe à faire la paix, mais tâche de préserver de toute destruction et de toute spoliation les demeures et les tombeaux de ses aïeux. » Une circulaire du Tsong-li-Yamen tira d’ailleurs sur-le-champ la conséquence pratique de cet appel au peuple en donnant tout pouvoir aux officiers chinois pour résister par la force[2], sans attendre les ordres venus de Pékin. La période des massacres et des pillages commença le 13 mai 1900 par l’attaque et l’incendie du village de Kao-lo, dont 70 habitans furent massacrés par les Boxers. On lisait sur les drapeaux des incendiaires une de ces deux inscriptions : « Protéger la dynastie, anéantir les Européens, » ou : « Par ordre de l’Empereur, anéantissons les Européens[3]. »

Le 21 mai 1900, les membres du corps diplomatique accrédités à Pékin adressèrent une note collective au Tsong-li-Yanien pour réclamer le bannissement de tous les membres de l’association des Boxers qui provoquaient des désordres dans les rues et répandaient des manifestes menaçans pour les étrangers, le châtiment des fonctionnaires négligens, l’exécution des meurtriers, des incendiaires, des personnes qui dirigeaient les actes des Boxers et leur donnaient de l’argent.

Tout porte à croire que les avis belliqueux du prince Tuan et de Kang-Yi, président du conseil de la guerre, l’emportèrent dans le Grand Conseil des ministres tenu le 19 juin par l’Impératrice[4]. On ne pouvait dès lors attendre que la réponse satisfaisante du Tsong-li-Yamen à la note collective. Celle que reçurent les ministres étrangers fût à bon droit regardée par le cabinet de

  1. Inséré dans le North China Herald du 27 décembre.
  2. Aux étrangers, bien entendu.
  3. Lettre de Mgr Favier du 18 mai (Annales de la propagation de la foi, septembre 1900).
  4. Voyez le Journal des Débats du 8 juillet 1900.