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LES
ÉPOQUES DE LA MUSIQUE

L'OPÉRA RÉCITATIF

La musique étant le seul de tous les arts qui se trouve parfois en relations et comme en société avec la parole, il s’ensuit que leur société comporte un régime commun. Nécessaire et variable, ce régime a subi, dans le cours de l’histoire, une éternelle vicissitude. La musique et la parole ont prétendu l’emporter tour à tour, et, tour à tour, elles y ont réussi. Rarement, — comme au temps de l’Opéra-Comique français, voire de quelques opéras allemands, — elles se sont partagé le pouvoir. Elles se le sont plus souvent disputé. In principio erat Verbum. Dans l’antiquité, la musique était soumise au verbe. Contenue en lui et s’en exhalant, nous avons jadis essayé de faire voir qu’elle n’en fut pour ainsi dire que l’émanation ou l’efflorescence sonore[1]. Issu de la mélodie antique, le chant grégorien, à son tour, respecta la parole : l’Eglise mit tout son génie à la moduler sans rien attenter contre elle[2]. Avec la polyphonie vocale, la musique reprit l’avantage ; elle en abusa bientôt et de l’excès, de la folie du contrepoint et du canon, la parole était sur le point de mourir.

  1. Voyez dans la Revue du 15 novembre 1899 : Les Epoques de la musique : l’Antiquité.
  2. Voyez dans la Revue du 15 novembre 1898, notre étude sur le chant grégorien : A l’abbaye de Solesmes.