Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 162.djvu/828

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du Hou-nan, tandis qu’ils arrosaient de pétrole et brûlaient vif son compagnon, le Père Quirino.

Quelques publicistes insinuent que la propagande catholique est l’origine de tous les troubles. Ils se trompent ; M. Pinon, M. Pierre Leroy-Beaulieu et d’autres l’ont clairement établi. Sans doute les mandarins font tout pour nous perdre dans l’esprit de la populace chinoise : ils leur persuadent que les chrétiens arrachent les yeux des enfans en bas âge, empoisonnent les puits, etc. Mais il ne faut pas exagérer l’effet de ces calomnies absurdes. Au demeurant, les deux grandes explosions de haine auxquelles nous avons assisté pendant le XIXe siècle se sont produites : il y a soixante ans, après la guerre de l’opium ; et, en 1897, après le débarquement des marins allemands sur le territoire du Chan-toung et l’occupation de Kiao-tchéou. M. P. Giquel, qui connaissait bien la Chine, la regardait encore, en 1872, comme « le pays le plus tolérant en matière de religion. » Mais elle craignait que le christianisme ne fût l’auxiliaire des ambitions européennes. Les Célestes mettent donc sous ce prétexte les chrétiens hors la loi des nations. Nous ne pouvons pas, en tant qu’Européens, les laisser faire, encore moins faire comme eux, encore moins leur dire : « Vous assassinez nos compatriotes ; mais, comme ce sont des missionnaires, grâces vous soient rendues : vous piétinez les traités au bas desquels nous avons mis notre signature ; mais, puisque vous piétinez en même temps l’Évangile, nous sommes prêts à vous embrasser. Grotius avait une assez haute conception de la justice internationale pour enseigner qu’on n’avait pas le droit de manquer à sa parole, ne fût-elle engagée qu’envers des pirates ; nous ne sommes pas tombés assez bas pour imaginer qu’on puisse violer une promesse, parce qu’elle a été faite à des chrétiens.


L’inviolabilité des agens diplomatiques est, de toutes les maximes internationales, la plus ancienne, la plus absolue, la plus universellement respectée. Elle s’étend à toutes les classes de ministres publics qui représentent régulièrement leur pays ; à tout le personnel, officiel ou non officiel, de la mission, à la famille et à la suite du ministre ; elle embrasse toutes les choses et tous les actes nécessaires à l’accomplissement de cette mission : l’hôtel, les équipages, la correspondance, les papiers ; elle persiste malgré la rupture des relations diplomatiques entre l’État que ce ministre représente et celui près duquel il est accrédité, malgré une