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gouvernement chinois une existence officielle et ne dépendent plus de son bon plaisir ; elles se sont multipliées, s’étendent au-delà de la Chine propre ; le nombre des chrétiens, qui avait diminué jusque vers 1850, s’est accru de nouveau, et par suite le nombre de ceux qui dans l’étranger ne voient pas un barbare et un ennemi. L’autorité pontificale a divisé la Chine en vicariats apostoliques indépendans les uns des autres, confiés à des missions différentes, et a ainsi prévenu le retour des conflits qui ont amené l’affaire des rites. Un péril vient toutefois aux missions de leur existence officielle même : les Chinois sont processifs, et souvent il s’en est trouve qui, ayant quelque litige, ont eu l’idée de se faire chrétiens, pour acquérir l’appui des missionnaires et, par eux, des agens étrangers ; ils auraient ainsi impliqué la mission dans leurs débats. Mais la durée de l’instruction religieuse, les conditions exigées des catéchumènes, l’enquête minutieuse qui précède l’admission, sont des garanties suffisantes pour écarter le danger des conversions intéressées, En fait, il est bien peu d’affaires relatives aux chrétiens auxquelles on puisse attribuer une telle origine. Presque toujours, quand des actes graves se sont produits, ç’a été du fait des bandes de pillards qui s’en prennent aux chrétiens comme aux autres, ou des sociétés secrètes qui en veulent et air gouvernement et aux étrangers. Il faut ajouter que le missionnaire n’intervient que rarement et prudemment en faveur de ses ouailles, cela surtout dans certaines missions particulièrement bien organisées, où les rapports avec les mandarins locaux sont réservés à quelques missionnaires expérimentés. La sagesse montrée par ces hommes dévoués a reçu, il y a deux ans, sa récompense officielle, quand un décret impérial a réglé sur le pied d’égalité les rapports entre évêques et hauts fonctionnaires, entre missionnaires et mandarins.

Depuis que les missions se sont solidement établies sur le sol chinois, elles ont repris l’œuvre d’éducation de leurs prédécesseurs du XVIIe et du XVIIIe siècle. Les moyens ne sont plus les mêmes : les lettrés n’oublient pas que les rites sont encore proscrits ; les mandarins se souviennent de la malveillance qui a longtemps régné à la Cour à l’endroit des chrétiens et qui subsiste chez un bon nombre de grands personnages envers tous les étrangers ; ils se tiennent donc à l’écart, n’ont avec les prêtres catholiques que les relations indispensables, et ne viennent plus étudier avec eux les sciences de l’Europe, qui ne piquent plus