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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 décembre.


La loi d’amnistie qui vient d’être votée par les deux Chambres sera, chez nous, le dernier acte politique, non seulement de l’année, mais du siècle : on aurait pu rêver pour celui-ci un plus beau couronnement. Si notre chronique ne devait pas se borner aux événemens de la quinzaine, nous aimerions à jeter un long regard en arrière sur ce siècle si agité, si passionné, si douloureux à quelques égards, mais noble, grand et généreux. Il ne fera pas mauvaise figure à côté de ses devanciers, et la France, malgré les malheurs qu’elle y a finalement essuyés, gardera une place d’honneur parmi les nations qui l’ont illustré dans tous les ordres d’activité de l’esprit humain, à l’exclusion toutefois de la politique, où nous n’oserions pas dire qu’elle ait particulièrement brillé, ou du moins réussi. Nul ne peut dire ce que nous réserve le siècle qui commence. L’avenir, sur bien des points, reste obscur, et, sur quelques-uns, inquiétant. On aurait sans doute bien étonné nos pères dans leur optimisme, si on leur avait annoncé que le siècle se terminerait au milieu de l’anarchie morale que nous sommes bien obligés de constater autour de nous, et sous les auspices d’un gouvernement à la fois faible et violent, qui ne conçoit le salut de la République que dans la suppression d’un certain nombre de libertés. Ils ont vu le jacobinisme héroïque, triomphant et couronné au commencement du siècle : à la fin, nous le retrouvons sans gloire, sans éclat, hargneux, agressif et mesquin. Espérons que son règne actuel sera éphémère. Mais, pour revenir à l’amnistie, elle aurait pu être un acte d’apaisement au milieu de