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fouilles de mineurs étrangers dans le Machona et sur tous les plateaux du Mozambique, suffiraient à témoigner de l’activité des anciens possesseurs du sol ; seulement, c’était surtout l’or, l’ivoire, les esclaves, qu’ils venaient chercher ; ils n’y fondaient guère des établissemens agricoles et s’installaient rarement à demeure dans le pays.

Mais, plus encore que la trop grande étendue de ses domaines, plus que ses procédés de colonisation, — qui, en somme, répondaient bien aux besoins du temps et à la nature des régions occupées, — ce furent les révolutions politiques du continent qui brisèrent l’essor de la métropole. Survint d’abord la conquête espagnole, qui, en englobant les provinces portugaises, dans les domaines de Philippe II, tarit la source même de l’énergie nationale. Quand le petit royaume fut rendu à lui-même, bien des choses dans le monde étaient changées ; ses colonies avaient périclité’ ; son commerce était déclin ; l’Angleterre disputait à la Hollande le sceptre des mers ; l’océan Indien appartenait déjà aux vaisseaux bataves, en attendant ceux du Grand Roi et ceux de la Compagnie anglaise des Indes : définitivement le Portugal passait au second plan.

Au début du XVIIIe siècle (1703), s’accomplit un acte décisif pour l’avenir du Portugal. C’était au commencement de la guerre de la Succession d’Espagne ; Louis XIV croyait s’être assuré l’alliance du petit royaume, quand un ambassadeur anglais, sir John Methuen, obtint la signature du fameux traité qui a conservé son nom. Pour quatre villes promises en Estramadure et trois en Galice, le roi de Portugal abandonnait la France ; il se jetait dans les bras de la Grande-Bretagne, il ouvrait tout grands aux marchandises anglaises ses ports et ses marchés, et n’obtenait, en retour, qu’un abaissement d’un tiers des droits sur les vins à l’entrée en Angleterre. Ainsi se nouait la chaîne économique qui allait lier, et qui lie toujours, le Portugal au Royaume-Uni. Il eut un débouché pour ses vins ; mais, à mesure que l’Angleterre se couvrit d’usines, elle l’inonda de ses produits fabriqués, elle étouffa chez lui toute velléité de transformation industrielle ; il ne fut plus réellement qu’une annexe économique de sa grande protectrice. Le commerce de ses colonies passa peu à peu tout entier aux négocians et aux marins anglais. On peut dire du Portugal, beaucoup plus vraiment que de la Hollande, qu’à partir du XVIIIe siècle, il n’est plus qu’une barque dans le sillage d’un vaisseau de haut bord.