par là, probablement, que l’art antique restera toujours sans pair. C’est qu’il traduit cette impression vive et perçante que font, sur l’homme, les choses qu’il voit pour la première fois. L’enthousiasme naît de ce que notre Montaigne appelle la « fraîche nouvelleté ; » il meurt de l’accoutumance.
La beauté du monde se révéla, d’abord, aux Méditerranéens. Et, en même temps, elle éveilla leur génie. Leur mythologie raconte leurs premières émotions, en présence de cette superbe et maternelle nature. Celle-ci pénètre dans leurs fables, avec son mystère entr’aperçu, fugitif et décevant. Leur langage nous a transmis, avec plus de précision encore, la même histoire lointaine ; ce langage si franc, si sonore, si plein, si voisin de l’onomatopée, où l’on entend comme les bruits à peine modifiés de l’univers murmurant ses premières leçons à l’oreille humaine attentive et charmée. Puis ce fut la poésie, puis ce furent les arts, et enfin la philosophie, qui condensa, en préceptes lumineux, la leçon que la nature vierge avait dite à l’homme vierge qui l’interrogeait.
Tout fut ainsi inscrit, noté, transmis oralement d’abord, et, plus tard, dans les poèmes didactiques et historiques qui confièrent aux générations futures la première science de la vie. Le code de la morale et la loi des sociétés furent élucidés, à leur tour, et cela avec une autorité et une précision telles que, sans doute, leurs grandes lignes ne peuvent plus être modifiées.
Dans tous les ordres d’idées à la fois, les plans furent tracés, les cadres établis, et, depuis, nous ne faisons plus rien que reprendre l’œuvre pour la compléter et l’orner, de môme que, dans nos vieux pays, les sanctuaires s’élèvent sur les sanctuaires et la pierre sur la pierre, sans que rien soit modifié aux substructions antiques.
Le coup d’œil et le coup de pouce des cinquante premières générations méditerranéennes ont fixé, pour toujours peut-être, et, en tout cas, pour des centaines et des milliers de siècles, le profil de l’humanité. Il est livré en modèle à toutes les autres nations. Les civilisations lointaines l’acceptent ; celles qui refusent de se conformer à ce type ont disparu ou sont menacées.
Quant à l’avenir, il doit réapprendre sans cesse ce que les anciennes générations ont appris. Il ne peut que broder des détails nouveaux sur une trame définitivement tissée. Mais, comme vous le disiez tout à l’heure, il n’arrivera jamais qu’un ouvrier produise une volute ou un méandre supérieurs à une volute ou à