Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/140

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du Milieu, en permettant à l’autorité centrale de faire sentir son action dans les provinces les plus reculées et de se procurer des ressources infiniment supérieures aux sommes qu’elle réussissait auparavant à faire rentrer dans ses caisses. Ceux qui disent que condamner la Chine à payer une indemnité de guerre considérable serait la vouer à la ruine ont à la fois raison et tort. Si l’Europe et les États-Unis prétendent obtenir cette rançon sans fournir à leur débiteur le moyen d’augmenter ses revenus, ils le précipiteront dans une crise dangereuse ; mais, s’ils savent lui imposer des réformes, ils pourront se faire rembourser ce qu’ils ont dépensé pour rétablir l’ordre à Pékin et laisser cependant à l’Empereur les sommes dont il a besoin pour administrer son immense territoire : c’est ainsi que nos diplomates trouveront une solution au problème qui se dresse devant eux, et dont les velléités de révolte, signalées dans diverses provinces, achèvent de démontrer l’importance. L’Amérique, dit-on, exigerait 125 millions de francs, la France 320, l’Allemagne 300, l’Angleterre 100, le Japon 125 ; la Russie, 450 millions, alors qu’avant de s’être heurtée au refus de la Chine de ratifier la convention relative à la Mandchourie, elle ne parlait point d’indemnité et paraissait plutôt disposée à passer condamnation à cet égard. La Belgique, l’Espagne, l’Italie, l’Autriche font entendre leur voix. Le total de ce que demandent les puissances dépasserait deux milliards. Elles ne peuvent songer à obtenir quelque chose d’approchant, si elles n’envisagent pas du même coup la réforme économique de la Chine, réforme dont le premier acte devra être une rénovation complète du système financier.

Il ne faut pas hésiter à prendre notre parti dans cette voie, sans nous arrêter aux objections de ceux qui redoutent les progrès que pourra faire une Chine instruite et réorganisée. On a beaucoup parlé du péril jaune ; parmi ceux-là mêmes qui ont très sagement fait justice du chimérique danger dont nous serions menacés par les armées et les flottes du Dragon, il s’est rencontré des hommes considérables qui nous adjurent de « ralentir le développement de la concurrence chinoise, » Nous ne partageons pas leur manière de voir : nous sommes convaincus que l’extension de nos rapports avec cet empire ne pourra qu’avoir pour l’Europe et les États-Unis des conséquences heureuses. Les tableaux que nous avons reproduits plus haut montrent à la fois que le commerce extérieur s’est développé rapidement