en plateaux et en plaines, pour que, suivant le fil de l’eau, tout marche vers Paris. On part de Paris pour descendre ou remonter la Loire si proche et descendre le Rhône. La Garonne, plus lointaine, n’échappe pas à l’influence. Blottie au pied des Pyrénées, elle est prise ; c’est par Toulouse que Paris a commencé la grande conquête. Une fois que le Parisien Simon de Montfort en eut fini avec les Albigeois, il n’y eut plus qu’à fermer le cercle et rabattre sur le centre pour ramasser la France.
Le cercle est le mot ; car la France est un rond dont le centre est dans le Morvan. Si Arnay-le-Duc n’est pas la capitale, — ou, pour mieux dire, Autun ou Bourges, — c’est qu’il fallait que le cours d’eau fût navigable, pour assurer la communication avec la mer, maintenir la Normandie influencée par l’Angleterre, et aussi, veiller à la frontière toujours menacée du Nord-Est. Mais Bourges ou Autun restent les capitales de la défense. La configuration intérieure de la France, la direction de ses vallées, de ses routes, de ses rivières, son peu d’étendue, la ceinture de ses montagnes, tout la déterminait pour graviter dans l’orbite d’une agglomération centrale, d’une capitale, comme Paris.
Telle est la loi de sa configuration intérieure, telle est aussi la nécessité de sa situation en Europe. La France est un lieu de passage nécessaire, un carrefour. Qu’on vienne par terre ou qu’on vienne par mer, il faut lui passer sur le corps. Pour aller d’un versant à l’autre, pas d’autre chemin que de lui emprunter ses passages. Rien n’est plus frappant, à ce point de vue, que ce qui se produisit au début des guerres de César. C’était un temps de grande agitation parmi les peuples européens. Des nécessités de subsistance ou le retentissement de quelque lointain déplacement des populations asiatiques avaient mis le monde européen en mouvement. La Gaule se trouva menacée de trois côtés à la fois. Quand César pénétra sur son territoire, il venait, appelé par les Gaulois eux-mêmes, apporter du secours contre une double invasion, celle des Germains d’Arioviste et celle des Helvètes de Dumnorix. On barra la route aux uns et aux autres ; mais ils devaient, pendant des siècles, frapper aux portes, et finir par passer, trois cents ans plus tard.
La France est donc située au carrefour des peuples. C’est un chemin sans cesse foulé, si elle s’ouvre ; et, si elle se ferme, c’est une place perpétuellement assiégée. D’Espagne, d’Italie, d’Autriche, d’Allemagne ou d’Angleterre, c’est à elle qu’on en veut.