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se modifie d’un cristal élémentaire à un autre, l’amas confus qui se trouve réalisé devient opaque. Une comparaison élucidera ce fait : le spectateur, qui, faisant face à la troupe, considère un régiment défilant en colonne au milieu d’un boulevard, distingue néanmoins (à part quelques éclipses périodiques) les promeneurs du trottoir opposé. Il ne les apercevrait pas, si les soldats en files régulières faisaient place à des bandes de manifestans ou à des promeneurs même peu nombreux circulant au hasard. Un grêlon, en définitive, est un assemblage hétérogène jusque dans ses particules les plus minimes.

Les observateurs, qui, maniant des grêlons fraîchement tombés, ont eu la curiosité de les briser et d’en sonder l’intérieur avec le doigt, n’ont pas manqué d’éprouver une véritable sensation de brûlure. En d’autres termes, le noyau d’un grêlon, peu d’instans du moins après sa chute, se trouve à une température très basse, naturellement bien inférieure au point fixe de la glace fondante.

Quel est le degré exact de cette température ? Il faudrait pouvoir disposer d’énormes grêlons, les creuser convenablement et introduire dans la cavité la boule d’un petit thermomètre,... circonstances rares et opération peu pratique. Mais les savans tournent la difficulté ; ils pèsent simplement le grêlon et l’introduisent dans un « calorimètre. » Un équilibre se produit, dont toutes les conditions se trouvent établies d’avance ; on observe la température finale à l’aide d’un thermomètre très exact et on dégage l’inconnue par un calcul numérique fort simple ; la difficulté réside plutôt dans les conditions d’expérience. Cette détermination a été faite dans l’été de 1875 par un des premiers physiciens de notre époque, M. Cailletet ; il observa — 9 degrés en opérant sur de jolis grêlons pesant 9 grammes et tombés dans le nord de la Côte-d’Or, près de Châtillon. La même année, un chimiste agronome dont le nom reviendra bientôt sous notre plume, M. Boussingault, tenta la même expérience à Unieux, au sud de Saint-Etienne, lors d’une grêle qui commit d’atroces ravages ; il trouva un chiffre plus bas encore : — 10°,3. Pendant l’essai, le thermomètre accusait 26 degrés de chaleur pour l’air ambiant !

Nous venons de formuler, — ou plutôt nous avons tenté d’exprimer, — différentes règles, générales dans leur ensemble, mais qui se heurtent à des exceptions fréquentes. La distribution