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Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/413

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et concorde suffisamment avec le graphique de M. Duchaussay, dont nous avons parlé plus haut et qui est plus récent, pour que nous réunissions les doux séries de résultats. Tirez d’abord une ligne de Moreuil à Bray ; prolongez-la dans les deux sens jusqu’aux frontières du département : tout ce qui se trouvera à droite ou à l’est de cette ligne n’a cessé et ne cesse encore d’être en butte aux attaques du fléau. De 1851 à 1868, Montdidier, Roye, Ham, Péronne ont horriblement souffert. Les taches noires symboliques indiquant les chutes dessinent sur la carte un réseau lugubre qui, fait assez curieux, s’entr’ouvre pour former une sorte d’enclave au sud de Rosières et de Chaulnes. Plus loin. Adieux et Doullens sont « détestables, » dirait un agent d’assurances. Les cantons d’Oisemont et de Moyenne valent un peu mieux... par comparaison, et Villers-Bocage, Gamaches, Ault semblent moins mauvais. Enfin, presque plus de points noirs aux environs d’Amiens, au nord d’Abbeville, pas plus que sur le littoral de la Manche jusqu’à Ault. Telle est l’inégalité de la distribution des orages à grêle, que tel canton est soixante fois plus atteint que tel autre. Au point de vue de la topographie physique, la grêle semble éviter le voisinage de la mer, fuir les quelques forêts qui demeurent dans la région, et affectionner surtout les plateaux de 100 à 170 mètres d’altitude dans lesquels les fleuves côtiers, et notamment l’Authie, prennent naissance.

Du Nord émigrons au Sud-Ouest. Contemplons la carte des grêles de la Gironde, embrassant les quatre années 1865 à 1868. Nous apercevons trois zones inégalement dangereuses : le triangle renfermé entre la mer, la Garonne et la frontière des Landes ne reçoit pas souvent la grêle. Ce fait concorde avec ce que nous avons déjà dit ; il est vrai que bien des chutes peuvent passer inaperçues dans les solitudes des pinèdes. Puis, en second lieu, l’arrondissement de Bazas et la rive droite de la Dordogne, au nord du département : régions déjà plus exposées. En troisième lieu, les alentours de Bordeaux et tout le territoire compris entre la Garonne et la Dordogne forment la zone la plus maltraitée, il résulte de la comparaison de ces observations avec celles résumées pour la Somme, que la grêle affectionne décidément les parties hautes des vallées et les plateaux intermédiaires, qu’elle s’écarte des forêts et s’éloigne de la mer. Mais, du défaut de fréquence à l’immunité absolue, il y a loin, et, en fait de grêle, « tel qui rit vendredi, dimanche pleurera. »