Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/416

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du végétal, qui souffre non seulement pour tout le reste de l’année courante, mais pendant l’année suivante, sans même parler de l’infertilité infligée au sol, qu’il est encore à la rigueur possible de corriger à force d’engrais nitriques.

Même s’il n’est pas haché par le projectile céleste et qu’il se trouve simplement meurtri, le grain de raisin ne peut parfaire l’évolution de sa maturité. Les lèvres de la plaie forment une fissure par laquelle peuvent s’insinuer, — sans métaphore, — avec la plus grande facilité, la pourriture, le black-rot et tutti quanti. Supposons le grain intact et le pédicelle atteint, il est clair que les sucs nourriciers de la tige parviendront aux fruits dans de détestables conditions et que la grappe mûrira mal. Et nous ne parlons pas des feuilles broyées, des sarmens tranchés ou même froissés ! Affaiblie par ses blessures, la vigne ne peut plus résister à l’assaut des fléaux cryptogamiques et autres qui la harcèlent sans cesse et s’attaqueront principalement aux organes atteints par la grêle. En admettant encore que le bloc de glace n’ait supprimé que quelques feuilles sans endommager le reste, il n’en résulte pas moins la nécessité absolue pour le vigneron de recommencer sur-le-champ ses traitemens anticryptogamiques, parce que les feuilles extérieures, celles qui ont reçu la poudre ou la bouillie, ont disparu les premières, laissant à découvert les feuilles intérieures non atteintes par le sel de cuivre.

Lorsque, au moment de la grêle, les raisins sont mûrs ou prêts à mûrir, il faut, soit les cueillir tout de suite, soit devancer l’époque normale de la vendange, selon les circonstances. De cette manière, on atténuera un peu les inconvéniens du fléau en coupant court au développement des maladies inévitables qui fondraient sur le raisin grêlé. Mais, de toutes façons, qu’on ne s’attende pas à obtenir un produit de choix. Un savant agronome toulousain, M. de Malafosse, n’estime pas à moins de 2 ou 3 degrés la perte en alcool sur les vins provenant de vignes grêlées par rapport à ceux récoltés sur des souches voisines indemnes, et l’acidité, ce facteur si nécessaire à une bonne vinification, perd absolument de sa régularité, si on la dose sur des raisins frappés par les grêlons.

Qui dit vigne grêlée dit être vivant malade qui non seulement devient incapable d’effort, mais encore réclame d’une façon urgente, par son état, des soins coûteux en vue d’un retour éventuel à la santé, En résumé, le propriétaire dont le vignoble a