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Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/711

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par leurs contributions. Il avait calculé qu’il pourrait se tirer d’affaire avec une douzaine d’élèves. D’autre part, il avait projeté de se faire suppléer à Montpellier par Chancel qui était son ami et son disciple et, par ce moyen, de l’acheminer à sa succession, pour le jour, qui ne pouvait tarder indéfiniment, où lui-même serait appelé à Paris.

C’est ainsi, en effet, que les choses se passèrent ; au moins quant à la première partie du programme. J.-B. Dumas l’aida à la réaliser. Un congé lui fut accordé ; Chancel fut désigné pour le suppléer. Mais l’Institut de chimie ne remplit pas toute son attente. Au lieu de 12 élèves, il n’y en avait plus que 4.

Laurent, épuisé par les agitations et les privations que lui imposèrent si longtemps des ressources insuffisantes, et l’impossibilité de se faire rendre justice, succomba au moment même où il venait d’entrer en possession d’un poste modeste, celui d’essayeur à la Monnaie, qu’il avait longtemps brigué. Quant à Gerhardt, il avait commencé à obtenir satisfaction. Il voyait ses idées et ses ouvrages adoptés dans toute l’Europe et sa réputation établie partout. Il venait d’être nommé correspondant de l’Académie des sciences. Le ministre Fortoul, cédant aux instances de Thénard, et à la pression qu’exerçait l’opinion générale des chimistes, le nommait, le 8 août 1855, aux deux chaires de Pasteur à la Faculté des sciences de Strasbourg et de Loir à l’École de pharmacie. Et c’est au moment où il rentrait glorieusement dans sa ville natale, accueilli avec joie par ses parens et ses anciens amis, qu’il fut brusquement emporté, en trois jours, par une attaque d’appendicite aiguë, dans toute la force de l’âge et la vigueur d’un esprit qui promettait à la Chimie française de nobles et fructueuses conquêtes.


A. DASTRE.