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gagner, eussent perdu du coup leur clientèle et leur influence, et à leur défaut, si on les avait supprimés, il eût suffi de nos noms placardés sur des affiches pour que les élections de Paris lussent aussi perdues qu’elles l’ont éte. Sans faire aucune exception pour la capitale, on s’en tint donc au système de 1851 et de 1857 des candidatures officielles.

On ne saurait refuser à un gouvernement le droit légitime de combattre, par tous les moyens légaux, les candidats révolutionnaires qui refusent de reconnaître son principe et sa légitimité ; ils se mettent hors la loi, il faut les traiter comme ils l’ont voulu eux-mêmes, en ennemis. Mais, entre des candidats qui se placent loyalement dans l’ordre constitutionnel, le choix doit être laissé aux électeurs sans aucune intervention administrative. Du reste les candidatures officielles de l’Empire n’étaient que jeux de novices à côté de la candidature officielle du régime républicain ; d’abord elle faisait plus de bruit que de mal, et elle ne fonctionnait qu’un ou deux mois en six ans ; en dehors, l’administration et la justice, impartiales pour tous, ne distinguait pas entre les ennemis et les amis du gouvernement ; dans les tribunaux, dans les finances, les ennemis du régime n’étaient guère moins nombreux que les amis. La candidature officielle républicaine fonctionne à haute pression, sans relâche : pendant tout le cours des quatre années qui séparent une législature de l’autre, il ne se donne pas un emploi, dans n’importe quel ordre, il ne s’accorde pas une faveur publique ou privée qui ne soit dictée par l’arrière-pensée de consolider une situation électorale, de préparer une élection, d’assurer une réélection. Quoi qu’on réclame, la première question qu’on vous adresse est : « Etes-vous appuyé par un député ? Sinon vous perdez votre temps. » Le gouvernement n’est qu’une puissante machine électorale, en élaboration constante de candidature officielle. L’administration n’a pas à exercer de violence, parce que les comités s’en chargent : il est difficile qu’un candidat combattu réussisse à se faire entendre dans une réunion publique.


II

Dans le parti démocratique, la première question soulevée fut telle de la conduite à tenir vis-à-vis des Cinq. Garnier-Pagès conçut le beau projet île les déposséder, non pas en les combattant