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plus aujourd’hui d’importance que pour lui. Ce qui en a beaucoup plus, c’est la déposition faite par le général Zurlinden, qui était gouverneur de Paris en février 1899, au moment des obsèques du président Faure et de l’équipée de M. Déroulède à la place de la Nation. M. Déroulède a affirmé récemment que, grâce à une indiscrétion volontairement commise, les ordres donnés la veille avaient été changés le lendemain, ce qui avait amené l’échec de ses profondes combinaisons. Il résulte de la déposition du général Zurlinden que les ordres généraux sont restés les mêmes : sur un point seulement, une modification a été introduite à la marche des troupes, et cela sur la demande expresse et spontanée du général de Pellieux. Le général de Pellieux savait qu’il devait être l’objet place de la Nation de bruyantes ovations, et peut-être même de quelque chose de plus : il n’a dénoncé personne, cela n’était pas dans son caractère ; mais il n’a pas voulu se prêter à une tentative contraire à son devoir militaire. Il s’est contenté de demander que la dislocation de ses troupes eût lieu avant qu’elles arrivassent à la place de la Nation, et, le défilé une fois terminé, il a gagné l’École-Militaire par les boulevards extérieurs. Le général de Pellieux était-il celui qu’attendait M. Déroulède ? M. Déroulède a-t-il été surpris de tomber sur le général Roget comme pis aller ? Quoi qu’il en soit, le premier de ces officiers s’est arrangé pour se soustraire à ce qu’on attendait de lui, et le second, sans doute très étonné de se voir en butte à des suggestions criminelles, a conservé jusqu’au bout l’attitude la plus correcte. Le général Zurlinden a été en droit de conclure que l’armée, malgré tout ce que les circonstances avaient eu parfois de pénible pour elle, s’était enfermée strictement dans son rôle, et qu’à aucun moment les influences politiques n’avaient agi sur elle. » Elle a été, grâce à Dieu ! préservée de leur contagion funeste. Cette affirmation d’un soldat dont la loyauté est notoire fera-t-elle définitivement tomber les accusations et les calomnies qu’on a si légèrement dirigées contre quelques-uns de nos généraux ? Nous voudrions le croire : en tout cas, la lumière est faite aux yeux de ceux qui ne cherchent que la vérité.


FRANCIS CHARMES.

Le Directeur-Gérant, F. BRUNETIERE.