Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 4.djvu/568

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

outre à peu près à égale distance de Cancale, où on la pêche presque à l’état de naissain, et de Paris, où on la mange en quantité de plus en plus considérable.

Le lit de la Seulles a donc été redressé et régularisé pour permettre l’entrée des petits caboteurs. Un chenal maritime a été ouvert en mer, protégé et maintenu par deux jetées en charpente de 150 mètres de longueur. A la suite, un large canal servant d’avant-port, de 580 mètres de longueur, présente un développement de quais de plus de 600 mètres, le long desquels sont disposés onze embarcadères en charpente contre lesquels accostent les navires. A l’extrémité du chenal, une écluse de 10 mètres de largeur, munie seulement de portes d’èbe, donne accès à un bassin à flot qui a près de 300 mètres de longueur et 60 mètres de largeur, 500 mètres de quai, et possède en outre une bonne cale de près de 150 mètres. Ces dispositions seraient très suffisantes, si le port était bien entretenu, pour le mouvement maritime, qui n’est guère que de 8 000 tonnes ; presque toutes à l’importation, houilles d’Angleterre, bois de Suède et quelques guanos, la plus grande partie des expéditions d’huîtres ayant lieu vers l’intérieur de la France par le chemin de fer. À ce mouvement, il faut joindre celui d’une pêche assez active, en été surtout, alors que Courseulles, comme tous les moindres villages échelonnés sur cette côte fortunée, devient un séjour de plaisance et de santé très fréquenté par les baigneurs.

Il nous est impossible de quitter la côte rocheuse du Bessin sans saluer du côté de la terre le clocher du village de Formigny. Ce petit bourg, situé à 2 kilomètres à peine en arrière des falaises crayeuses qui dominent la plage moderne de Saint-Laurent, rappelle en effet un des plus grands et des plus heureux événemens de notre histoire nationale. C’est là, à moitié chemin entre Isigny et Bayeux, sur la grande route de Bayeux à Caen, que le connétable de Richemont et le comte de Clermont portèrent, le 15 août 1450, le dernier coupa la domination des Anglais en Normandie. L’héroïque et sanglante bataille de Formigny mit un terme définitif à une lutte et à une usurpation qui durait presque sans relâche depuis Guillaume le Conquérant. Une très modeste borne signale le glorieux emplacement.