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LA
CARICATURE EN ANGLETERRE

I
GILLRAY ET ROWLANDSON


I

Il y a de longues années, j’étudiais la marche de la société anglaise, l’évolution des idées et des mœurs à travers les œuvres de la littérature. La pensée m’était venue, dès le principe, de demander aussi des lumières sur ce sujet, et comme une contre-épreuve de mes premières observations, à l’histoire de l’art national. Je trouvai là, en effet, une riche source d’informations. De nos jours, l’art anglais, grâce aux préraphaélites et à Ruskin, a perdu son caractère insulaire et indigène. Au lieu d’exprimer les qualités et les défauts de la race, il s’applique à traduire des idées générales ou des sentimens humains : christianisme, démocratie, exotisme. Il a noyé ainsi son individualité dans les grands courans qui emportent l’humanité contemporaine.

Mais, en remontant dans le passé, je retrouvais cette individualité qui s’accusait de plus en plus distincte. Chez tous les artistes du XVIIIe siècle, sauf, peut-être, une seule exception, après l’inévitable pèlerinage de Rome et de Florence, après de longues méditations devant les toiles de Michel-Ange, de Raphaël et du Titien, je voyais l’insularité, l’« Anglaiserie », si je puis dire,