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donc amené à constater que c’est de l’initiative de ces magistrats qu’est sortie l’institution du « conclave. » Les cardinaux ne souscrivirent pas sans peine à une innovation qui avait pour effet de limiter la souveraineté du collège, sede vacante. La bulle pontificale fut plus d’une fois violée dans la suite ; les règles qu’elle posait n’en devaient pas moins passer avec le temps dans la pratique et constituer la base de la législation qui a prévalu, en ce qui concerne l’élection des papes.

L’église de San Francesco, construite, à l’autre bout de la ville, sur l’emplacement d’un ancien château lombard, renferme des tombeaux où triomphe l’art des mosaïstes du moyen âge. Ces maîtres avaient trouvé des formes admirables pour embellir la sépulture chrétienne, sans altérer son caractère traditionnel. Ces figures de morts qui reposent, les mains jointes, sur un sarcophage et sous un dais gothique, respirent la paix que l’Eglise promet à ceux qui ont vécu sous sa loi ou qui, à l’heure suprême, se sont réconciliés avec elle. Au pécheur, même au criminel converti, elle ne refuse pas l’absolution, témoin ce Pietro di Vico dont le sépulcre se trouve dans le transept. Ce fut, tandis qu’il vivait, un gibelin militant, grand usurpateur de biens ecclésiastiques, partant chargé d’innombrables censures. Il mourut des suites des blessures qu’il avait reçues à la bataille de Tagliacozzo. Il prétendit, à son lit de mort, que l’éclat de son repentir ternît, s’il était possible, celui de ses crimes. Dans son testament, il ordonna, — tant sa conscience était bourrelée de remords et son âme harcelée par la crainte des flammes éternelles, — que son cadavre serait écartelé et partagé en sept morceaux, en souvenir des sept péchés mortels qu’il avait commis avec excès.

Non loin de ce féodal féroce, repose le pape qui le poursuivit de ses foudres, ce Clément IV qui réduisit à néant les espérances de l’infortuné Conradin.

Au jugement des gens de Viterbe, Clément IV était mort en odeur de sainteté. Le souvenir des victoires remportées sous ses auspices faisait impression sur les esprits ; les vertus du pontife avaient touché les cœurs. Pour lui obéir, on l’avait enterré à Santa Maria de Gradi, l’église des dominicains. Bientôt le bruit se répandit que son tombeau opérait des miracles. La foule y accourut ; c’était pour l’église un gage assuré de célébrité, une promesse de gains inattendus. Les chanoines de la cathédrale tressaillirent