C’est pour cette raison que les armées qui s’éloignent de la guerre ont une tendance à devenir formalistes. Elles réclament des formations normales de combat et veulent trouver le secret de la victoire dans des articles de règlement, au lieu de le chercher où il réside, dans le cœur du soldat.
Cette vérité a la plus grande peine à se faire jour. Les dernières guerres montrent à quel point elle est encore méconnue.
Meine Maschinen sind bereit (mes machines sont prêtes), disait, il y a peu d’années encore, le capitaine prussien à son colonel, pour lui faire savoir que ses recrues avaient terminé leur instruction individuelle. Tout le principe de la discipline coercitive est dans ces mots. Transformer l’homme en une machine, n’ayant ni pensée, ni volonté, ni action en dehors du commandement ; tel est le but.
Cette discipline a même la prétention de mener l’homme à la mort malgré lui.
Elle a conduit à cette hérésie qu’une position peut être forcée à coups d’hommes.
Elle avait si profondément pénétré dans l’esprit du commandement allemand, qu’en 1870, malgré la puissance de la mousqueterie nouvelle, on le voit s’efforcer de la mettre en pratique.
Cette erreur capitale peut avoir les plus graves conséquences.
En ce moment même, on pourrait encore citer telle puissance militaire qui s’obstine à chercher des formes tactiques définies et compactes, donnant aux attaques la propriété d’être victorieuses.
Les procédés de combat des guerres futures sont ainsi mis en question ; aussi, est-il nécessaire d’examiner en détail ce qu’il est advenu dans les dernières guerres, lorsque les attaques en masse, dites décisives, ont été essayées.
Transportons-nous au milieu des Allemands, le 18 août 1870, à 5 heures et demie du soir, devant Saint-Privat.
Le prince Auguste de Wurtemberg vient trouver, à Sainte-Marie-aux-Chênes le général von Pape, commandant la 1re division de la garde prussienne, et lui donne l’ordre d’attaquer.
La 1re brigade de cette division est à ce moment à cinq cents pas au Sud-Ouest de Sainte-Marie, face à ce village. Le 3e