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Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 5.djvu/821

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fois exact et ouvert, qui était habitué à regarder les faits sous toutes leurs faces, et savait discerner les conséquences multiples et lointaines d’un petit détail qui, pour d’autres, aurait passé inaperçu.

Ces riches connaissances et ces rares qualités profitèrent singulièrement au Dictionnaire général, Darmesteter avait admirablement conçu le plan de la partie étymologique ; mais il ne l’avait achevée que pour les mots qui devaient figurer dans les toutes premières livraisons ; par la suite, il l’avait, au moins dans beaucoup de cas, seulement ébauchée, se promettant d’y revenir à loisir pendant que l’ouvrage s’imprimerait. M. Thomas revit soigneusement — c’est trop peu dire : — il repensa tous les articles étymologiques ; aussi en est-il, à vrai dire, seul responsable, bien que Darmesteter, dont il a recueilli tant de découvertes ou d’heureuses suggestions, en doive partager avec lui le mérite et l’honneur. Ce mérite et cet honneur ne sont pas minces ; car la partie étymologique du Dictionnaire général marque sur celle de Littré un progrès considérable, dont j’ai indiqué les principaux caractères. Il est vrai que le Dictionnaire général, en raison de la dimension restreinte qui lui était imposée, a dû se priver de plusieurs élémens très intéressans des notices étymologiques de Littré : il ne poursuit pas l’histoire des mots au-delà du latin pour les mots héréditaires, du latin ou de toute autre langue pour les mots empruntés ; il ne donne les formes correspondantes à la forme française, tant dans les patois française que dans les autres parlers romans, que si elles sont absolument nécessaires à l’explication ; il s’abstient de toute dissertation ; il ne cite pas les auteurs des étymologies qu’il adopte, encore moins discute-t-il celles qu’il n’adopte pas. Cela cause un certain désappointement au lecteur, surtout pour les mots désignés comme « d’origine inconnue, » dont on aimerait à savoir si on n’a pas essayé de leur en trouver une. Les articles, brefs et dogmatiques, avec leurs renvois chiffrés, ont une sorte d’apparence algébrique, et manquent du charme qu’offrent souvent ceux de Littré. En revanche, beaucoup de mots y sont accompagnés d’exemples, — chacun, en général, d’un seul, — dont le choix, dirigé par une vue simple et précise, est un des traits les plus intéressans du nouveau dictionnaire.

Le dictionnaire, en effet, n’a pas d’ « historique. » Pour les mots héréditaires, à moins de raisons particulières, il ne