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Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 5.djvu/886

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certain nombre de ces nouveaux centres. « Si l’on veut se rendre compte de la prospérité des centres créés, disait-il dans son Rapport sur le budget de l’Algérie, on constate que, sur les 218 centres qui ont été créés de 1871 à 18860, 135 se sont développés, 80 sont restés stationnaires ou même ont reculé, 10 ont perdu plus de 50 pour 100 du chiffre initial de leur population. Strasbourg était tombé de 420 à 180 habitans, Sidi-Embarek, de 539 à 91, Bou-Malek de 112 à 33, Blad-Youssef, de 192 à 32, Aïn-Melouk, de 105 à 42. La plupart des insuccès marqués s’étaient produits dans la province de Constantine, où 15 villages avaient à peu près avorté. » Depuis que M. Burdeau écrivait ces lignes, l’établissement des villages créés dans ces dix dernières années n’a guère donné de meilleurs résultats. En 1891, on envoie à Stora, en deux fois, 85 personnes ; en 1899, il en restait une seule, et c’était le garde champêtre. Combien y a-t-il encore d’ouvriers de la première heure dans les villages de pêcheurs qu’on a voulu créer il y a quelques années ? Tout dernièrement, un homme notable de Constantine, faisant des tournées dans le département, a voulu noter dans les villages le nombre des familles de la colonisation officielle qui sont restées sur leurs concessions, et il a constaté que cette couche d’immigrans a presque totalement disparu. A El-Mader et à Mac-Mahon, il en a retrouvé quelques-unes ; à Aïn-Touta, 6 sur 30 ; à Lambessa, aucune sur 100. Et il en est de même dans tous les autres centres. Ce qu’il y a de plus étonnant encore, c’est que quelques-uns de ces derniers ont même totalement disparu. A Fontaine-Chaude et à Aïn-el-Ksar, on chercherait vainement une construction et un colon. Tout a disparu. Et de ces villages de la création officielle on peut dire : etiam periere ruinæ, les ruines elles-mêmes ont péri.


III. — LES COLONS LIBRES SE SUBSTITUENT PARTOUT AUX COLONS OFFICIELS

L’Algérie, en dehors des ports du littoral et de quelques grandes cités de l’intérieur, ne serait plus qu’un amas de ruines et un pays à peu près vide d’Européens, si des colons autres que ceux établis par l’administration n’étaient venus repeupler le pays et combler les vides dus à la colonisation officielle. A peine l’insurrection de 1840 était-elle terminée qu’on vit des immigrans libres de toute attache officielle venir en Algérie. Les uns commencèrent par s’établir dans les villes et devinrent des