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demander l’autorisation. La loi actuelle n’est qu’un nouveau pas en avant dans la guerre qui se poursuit contre l’Église. C’est l’Église qui est attaquée dans les congrégations, et c’est elle que les congrégations défendent en repoussant une autorisation qui a pour but de les asservir et de préparer l’asservissement de l’Église elle-même. Une telle autorisation, nous ne pouvons pas la demander. » Ces paroles sont peut-être vraies, mais elles sont dures : on comprend qu’après les avoir prononcées, les jésuites aient éprouvé le besoin d’affirmer qu’il est très loin de leur pensée de blâmer ceux de leurs frères dans la vie religieuse qui ont cru devoir prendre un autre parti. « Nous savons, disent-ils, combien la délibération a été pleine d’angoisses. Forcés de choisir entre deux maux, tous deux très graves, entre les ruines de toutes sortes qui vont suivre l’abstention, et, d’autre part, l’atteinte profonde portée par la loi aux prérogatives de l’Église, non moins qu’aux libertés individuelles, l’hésitation s’explique, et le. Souverain Pontife lui-même, sous certaines réserves, a laissé aux congrégations la liberté de se déterminer. Plusieurs d’entre elles croient pouvoir trouver une formule de conciliation qui satisfasse le gouvernement sans sacrifier les droits du Saint-Siège. Pour nous,… nous avouons, avec tous les religieux qui ont pris le chemin de l’exil ou se sont dispersés, ne pas trouver la formule de conciliation. » On pourrait dire à cela que cette formule de conciliation, le Saint-Siège lui-même l’a trouvée et proposée : il y a lieu de croire qu’il connaît ses droits, et qu’il ne les a pas sacrifiés. De même, lorsque les jésuites déclarent un peu plus loin que « demander l’autorisation serait livrer aux adversaires de l’Église des œuvres cent fois approuvées par elle, » on pourrait faire remarquer que, quelques lignes auparavant, les provinciaux de la Compagnie de Jésus avaient expliqué la soumission du plus grand nombre de leurs frères par les ruines sans nombre qui auraient suivi leur abstention. Enfin, on aperçoit clairement entre les lignes de cette Déclaration la défiance de certains ordres religieux à l’égard du clergé séculier. Plus d’une fois, au cours des polémiques que la loi nouvelle a provoquées, nous avons été tentés de prendre la défense de nos évêques et de nos archevêques. Mais à quoi bon insister aujourd’hui sur ce point ? Tout ce que nous avons voulu montrer, — et la Déclaration des jésuites nous y aidait merveilleusement, — c’est la douloureuse gravité du cas de conscience en présence duquel les congrégations se sont trouvées. On comprend les déchiremens qui se sont produits en elles. Quand les jésuites disent que demander l’autorisation en acceptant la juridiction de l’ordinaire, « ce serait porter