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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 octobre.


La rentrée des Chambres, qui a eu lieu le 22 octobre, a été précédée et accompagnée de circonstances particulières, en partie nouvelles dans notre histoire politique. C’est une nouveauté, par exemple, de voir chez nous le budget en déficit. Nous ne voulons pas dire par là que l’équilibre en ait toujours été bien sincèrement établi ; mais enfin l’apparence était satisfaisante, et il y avait toujours, pour faire contrepoids à des augmentations de dépenses, peut-être inévitables, des augmentations de recettes correspondantes. Nous étions habitués à ce qu’on appelle, en langage technique, des plus-values sur les évaluations budgétaires. Mais ce sont là des souvenirs. Aujourd’hui, nous avons des moins-values. Les évaluations sont inexactes, comme autrefois, mais en sens inverse : au lieu d’être plus riches, nous sommes plus pauvres que nous ne l’avions cru. Cela étant, on comprend que l’œuvre de la commission du budget, du gouvernement et des Chambres soit plus difficile qu’à l’ordinaire : nous allons voir quels procédés ont été proposés pour y faire face. Mais, quelque grave que soit l’apparition du déficit dans le budget, notre horizon politique est obscurci par d’autres points noirs encore plus inquiétans. Un trouble profond règne dans le monde du travail. On a fait luire aux yeux fascinés des ouvriers des espérances très séduisantes, qui n’ont d’autre tort que d’être chimériques. Les ouvriers en attendent avec impatience, en demandent, en exigent la réalisation. Ils menacent de la grève générale, si la mauvaise volonté des pouvoirs publics s’oppose plus longtemps à l’ouverture de l’âge d’or qu’on leur a promis. L’exécution de cette menace a été ajournée déjà à plusieurs reprises, et elle vient de l’être une fois de plus ; mais le danger subsiste et va sans cesse en s’aggravant. Ainsi, embarras financiers, péril économique et