Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 6.djvu/587

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LES FORCES PERDUES

ÉTUDE DE POLITIQUE CONTEMPORAINE

Entrons dans le village, dans le bourg, dans une de ces petites agglomérations où vivent les deux tiers des Français : considérons le cultivateur, le commerçant, celui qu’un travail régulier ou la possession d’un petit bien met au-dessus des privations de la misère. Il n’a pas brigué un mandat de conseiller municipal, mais il est estimé de tous. Vienne le moment de fixer le contingent foncier, il est porté par le Conseil municipal sur le tableau des répartiteurs, et il donnera quelques heures de son temps, une ou deux après-midi, à discuter avec ses voisins la valeur des biens. Le Conseil pourra encore le nommer membre du bureau de bienfaisance ; chaque année, à l’entrée de l’hiver, il dressera la liste des indigens à secourir et des habitans qui recevront le secours médical gratuit. Enfin, pour comble de faveur, il sera inscrit sur la liste de la commission scolaire, dont les attributions sont tellement faibles qu’en fait elle ne se réunit pas. Dans l’organisation actuelle, ces trois missions sont les seules qu’un citoyen éclairé puisse recevoir. Il y consacrera tout au plus quelques heures dans le cours de l’année.

Allons jusqu’au chef-lieu d’arrondissement, ou jusqu’au chef-lieu du département. Les intérêts généraux seront plus considérables ; les fonctions gratuites seront presque aussi rares. Au bureau de bienfaisance s’ajoutera le Conseil des hospices ; la Caisse d’épargne aura des administrateurs ; il existera peut-être une commission de la Bibliothèque ; on a essayé récemment de