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UN GÉNÉRAL ESPAGNOL

DON JUAN PRIM[1]

On raconte, — et je crois bien me souvenir qu’il me la raconté lui-même, — que, don Emilio Castelar étant venu à Paris aux plus beaux jours du « boulangisme, » une de ses amies, qui tenait à lui présenter les dernières célébrités de la capitale, lui demanda s’il ne lui serait pas agréable de se rencontrer avec le général : — « Oh ! fit-il, je le connais. C’est un général espagnol ! »

Don Emilio, à coup sûr, ne voulait rabaisser par là ni les mérites de Boulanger ni ceux de généraux — espagnols — qu’en bon Espagnol, et Dieu sait s’il l’était ! il avait, autant que personne, plus que personne peut-être, traités dans ses discours de distinguidos, ou inteligentes, ou valientes, ou pundonorosos, et dont beaucoup certainement étaient dignes, avec tous les respects, de toutes ces épithètes. Mais ce qu’il voulait dire, c’est qu’entre les militaires, à qui les habitudes, les occupations, les obligations, les résignations professionnelles donnent en tout pays comme un air de famille, et qui se ressemblent tous sous un uniforme ou sous l’autre, le général espagnol, — certain type du moins de général espagnol, — forme, lui, une espèce, une catégorie à part.

Non pas qu’il soit proprement et nécessairement espagnol,

  1. Ministres et hommes d’État. Prim, par H. Léonardon : 1 vol. in-16 ; Félix Alcan. 1901.