Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 6.djvu/697

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aux courans ordinaires par conduction. Au contraire, l’on ne connaît pas de déviations imprimées par l’aimant aux radiations de l’éther, aux rayons calorifiques, lumineux ou actiniques.

En troisième lieu, le rayon cathodique est électrisé. Nous l’avons supposé, implicitement, tout à l’heure, en disant qu’il était assimilable à une file de particules électrisées, c’est-à-dire à un courant. Il faut donc que l’on puisse manifester la charge qu’il transporte. Crookes avait cru y réussir. Ebert et Wiedemann firent voir le caractère illusoire de sa démonstration. Ce fut un jeune physicien français, M. Jean Perrin, qui, par une expérience très élégante, mit en évidence ce caractère essentiel de la radiation cathodique, d’être chargée d’électricité négative.


Le phénomène cathodique, tel que nous venons de le décrire, s’accomplit tout entier à l’intérieur de l’ampoule : il y a son commencement et sa fin. Jusqu’en 1894, il avait été impossible d’étudier ces rayons à l’abri des complications expérimentales du milieu où ils ont pris naissance. Ils restaient enfermés dans leur berceau d’origine comme dans une prison. Lenard réussit à les en faire sortir, et ses belles expériences de 1894, qui tirèrent ces rayons captifs de leur geôle de verre, eurent un légitime retentissement dans le monde des physiciens.

Le verre arrête les rayons cathodiques : on ne le savait que trop. La plupart des autres substances en font autant. Toutefois Hertz, dès 1883, avait annoncé que les lames métalliques peuvent leur livrer passage, à la condition d’être assez minces. Leur épaisseur ne doit pas dépasser quelques millièmes de millimètre (microns). Lenard se proposa donc de remplacer la portion fluorescente de l’ampoule de verre où tombe le faisceau cathodique par une pièce de métal. Encore fallait-il que cette pièce fût assez solide pour ne pas céder à la poussée de l’air. Toute la difficulté était là. Lenard réussit à la lever. Il pratiqua dans son tube de Crookes une petite fenêtre qu’il ferma au moyen d’une lamelle d’aluminium de 3 millièmes de millimètre d’épaisseur. Cette feuille se montra capable de résister à la pression atmosphérique et de tenir le vide. Les rayons cathodiques, plus subtils que les molécules gazeuses, s’échappèrent, et l’on put les étudier en liberté.

Ils apparurent, au dehors, tels qu’ils s’étaient montrés dans