Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 6.djvu/732

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle était le sixième enfant et l’aînée des filles (car elle avait une sœur cadette) de Jacques d’Aumale, seigneur de Mareuil, et de Suzanne de Courcelles. La maison dont elle sortait passait pour fort ancienne. Le Père Anselme n’hésite pas à dire que les d’Aumale de Picardie étaient de même souche que l’illustre maison des comtes d’Aumale de Normandie. En effet les deux familles portaient les mêmes armes : d’argent à une bande de gueules, chargée de trois besans d’or, qui sont encore aujourd’hui celles de la petite ville d’Aumale. Les d’Aumale de Picardie s’étaient eux-mêmes séparés en plusieurs branches dont la fortune avait été inégale. A l’une de ses branches appartenait la maréchale de Schomberg, fille de Daniel d’Aumale, seigneur d’Haucourt. La Maréchale, avant que son mari, huguenot, n’eût passé à l’étranger, avait fait assez grande figure à la Cour. Quand Mme de Maintenon s’attacha Mme d’Aumale, elle écrivit à la princesse des Ursins : « Elle est de la même maison que la maréchale de Schomberg qui aurait, je crois, trouvé bien mauvais de voir une fille de son nom auprès de moi. Je le trouve aussi mauvais qu’elle, mais, ne pouvant lui faire une fortune convenable à sa naissance, je lui fais passer une vie assez heureuse, et je crois être en droit de traiter les demoiselles de Saint-Cyr comme mes enfans. »

Jeanne d’Aumale fut reçue à Saint-Cyr en novembre 1690, sur les preuves de sa noblesse, établies, nous apprend d’Hozier, depuis Jean d’Aumale, son sixième aïeul, dont le petit-fils avait épousé Madeleine de Villiers de l’Isle-Adam, nièce du grand-maître de Rhodes[1]. On n’en demandait pas tant, puisque, pour être reçues à Saint-Cyr, les demoiselles n’avaient à faire preuve de noblesse que depuis la quatrième génération, et encore du côté du père, ce qui prouve que, chez la noblesse pauvre, les mésalliances étaient déjà fréquentes. Deux cousines de Jeanne d’Aumale, Marie-Louise et Isabelle-Henriette, avaient été déjà reçues à Saint-Cyr en 1686. Sa sœur Charlotte y fut reçue en 1692. C’est que les d’Aumale, famille nombreuse, noble et pauvre, rentraient tout à fait dans la catégorie de celles que Mme de Maintenon avait en vue, lorsqu’elle avait arrêté sa constitution définitive de Saint-Cyr.

C’est une des nombreuses erreurs que certaines ignorances

  1. D’Hozier, édition de 1738. Registre Ier, 1re partie.