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L’Associé de Santa Claus.


I


Berryman Livingstone avait réussi, pleinement, brillamment réussi. Toutes les lignes de son visage régulier affirmaient le succès, un visage maître de lui, au nez droit et mince, au menton énergique, aux yeux gris résolus, et aussi chaque détail de sa tenue irréprochable. De même encore le ton assuré, incisif, de ses discours. Il semblait toujours, avait dit de lui quelqu’un, qu’il vînt d’être repassé à neuf.

Berryman Livingstone avait réussi, et il le voyait assez à l’envie silencieuse avec laquelle était considéré en lui le capitaliste, au respect avec lequel son opinion était reçue dans les différens conseils d’administration dont il faisait partie ; il en était averti par le nombre d’invitations qui pleuvaient chez lui, par l’air jovial et familier que prenaient pour l’accueillir tels présidens et potentats de grosses corporations qui, quinze ans auparavant, eussent ignoré jusqu’à son existence, par les avances enfin dont le comblaient les mères de filles non mariées, d’un âge incertain. Toutes ces dames ne cessaient de le taquiner sur sa belle maison vide, sur ses somptueux dîners auxquels ne manquait qu’une chose, — la chose qui faisait l’objet de leur constante préoccupati