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s’imposera bientôt à nous d’une manière encore plus évidente si, comme cela est arrivé cette année, il continue d’y avoir, en même temps qu’un accroissement dans nos dépenses, une diminution dans les plus-values et une augmentation dans les moins-values. Le budget courant est en déficit ; tout le monde le reconnaît, on se contente de discuter sur le chiffre. Le budget de l’année prochaine est très difficile a établir, et il s’en faut de beaucoup que l’équilibre en soit assuré par les économies qu’a faites, ou qu’a prétendu faire la commission. Il est vrai que le rapporteur général, M. Merlou, a exposé une théorie tout à fait neuve, d’après laquelle il y aurait équilibre et équilibre, comme il y a fagot et fagot : les conditions en changeraient suivant les circonstances. Que cette théorie soit commode, cela est hors de doute ; nous ne souhaitons pourtant pas que l’application en passe dans nos mœurs publiques.

Il n’y a qu’un équilibre, s’est écrié M. Ribot, c’est celui qui fait exactement correspondre des dépenses indispensables avec des ressources réelles. Si on a mal calculé les dépenses, ou si on les a artificiellement diminuées, on a affaire aux crédits supplémentaires. La commission a retranché, par exemple, une douzaine de millions sur la Guerre et sur la Marine ; mais, d’autre part, les ministres de la Guerre et de la Marine font déjà entrevoir des dépenses nouvelles. Ces dépenses sont de celles que les Chambres refusent le moins. Peut-être n’en sera-t-il pas toujours de même : si le parti socialiste s’empare complètement un jour de la direction des affaires, certaines interruptions parties des bancs de l’extrême gauche permettent de croire que les budgets de la défense nationale passeront un mauvais quart d’heure : ils seront traités aussi mal que l’est aujourd’hui celui des cultes. Mais nous n’en sommes pas encore là, et nous ne savons pas quel fond on peut faire sur les économies que la commission a réalisées de ce chef. Quant au budget des cultes, elle l’a supprimé d’un trait de plume : c’est même sa plus notable économie. Toutefois, au dernier moment, le cœur lui a manqué. Les hommes farouches qui la composent ont reconnu qu’il y avait dans ce budget cinq ou six millions de dépenses absolument obligatoires ; et, de plus, ils se sont apitoyés sur le sort d’un certain nombre de vieux prêtres qu’on ne pouvait pas, sans cruauté, mettre purement et simplement sur le pavé. Il faudra leur accorder des secours ou des pensions qui s’élèveront à une quinzaine de millions, de sorte que l’économie immédiatement réalisable sur le budget des cultes s’élèvera seulement à une vingtaine. Mais enfin, c’est vingt millions ! — Et vous dites, s’écrie la Commission, que nous n’avons