généreux efforts ! » Les limites naturelles, la ceinture des républiques alliées, le Piémont formant notre 278 division militaire, les colonies acquises ou restituées : « la France jouira de la paix, refera sa marine, réorganisera ses colonies, recréera tout ce que la guerre a détruit. Portons dans les ateliers de l’agriculture et des arts cette ardeur, cette constance, cette patience qui ont étonné l’Europe dans toutes les circonstances difficiles. Unissons aux efforts du gouvernement les efforts des citoyens, pour enrichir, pour féconder toutes les parties de notre vaste territoire. » Industrie, marine, colonies, ce sont les articles fondamentaux de ce grand acte de la paix : « le spectacle de nos jouissances, » dit Bonaparte.
Cette proclamation et cet exposé forment ainsi la contrepartie des harangues prononcées au Parlement anglais ; ce que Bonaparte annonce comme les effets essentiels de la paix, ce sont les conséquences que, déjà, les Anglais en redoutent le plus.
Et ce sont celles qu’attendent les Français. Si splendide que soit cette paix, elle ne fait que répondre à l’orgueil national. Les esprits, en France, n’étaient pas alors à la modestie, même à la modération. Ils y sont venus plus tard, après la catastrophe, dans l’histoire écrite, lorsque, tout étant perdu des conquêtes de la République et de l’Empire, chacun, en son cabinet et devant son écritoire, se forgeant rétrospectivement une Europe et une France selon ses désirs, faisait aisément le sacrifice des conquêtes les plus lointaines pour conserver les plus proches, et, selon ses goûts, abandonnait l’Italie et la Méditerranée pour le Rhin, ou l’arbitrage et la reconstitution de l’Allemagne pour l’Italie et la Méditerranée. Les choses, dans l’histoire vécue, ne se sont pas présentées de la sorte : l’option eût été impopulaire, et, d’ailleurs, le choix ne fut jamais libre. La République n’était pas seulement fière, elle était superbe. Toute concession passait pour un recul, tout recul pour une trahison, aux yeux de ces héritiers des conventionnels ; des passions révolutionnaires, ils n’en avaient guère conservé que deux : l’esprit de suprématie en Europe, l’esprit antichrétien en France. Contracter avec le Pape sur les arrangemens de la religion en France leur paraissait une capitulation de la souveraineté du peuple ; évacuer un territoire occupé par les armées françaises leur semblait une capitulation de la grandeur nationale.