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quelque terre à titre de bénéfice), mais, si ces obligations nouvelles venaient à se trouver opposées à celles qui unissaient les plebenses au machtiern, elles s’effaçaient devant ces dernières. Le lien entre le machtiern et les plebenses avait pour origine, non pas un contrat, ni une convention quelconque, mais la fondation même du plou, et rien ne pouvait le rompre. Le machtiern pouvait réclamer main-forte de ses plebenses pour défendre sa personne ou pour assurer l’exécution de ses jugemens, mais il n’avait pas le droit de guerre privée. Il devait au comte la fidélité, l’obéissance à son tribunal, et le service militaire avec les hommes de son pion.

Il y avait en Bretagne trois ordres de juridiction : la cour du roi, celle du comte, et celle du machtiern. La première avait juridiction sur les comtes, la deuxième sur les machtierns et la troisième sur les hommes du plou. Tout sujet d’un plou était soumis au tribunal de son machtiern, même s’il s’était constitué le vassal ou fidèle d’une autre personne. Ces divers tribunaux suivaient une procédure analogue à celle du jugement par jurés.

On distinguait trois classes de personnes : les serfs, les colons, les hommes libres.

Les serfs avaient une condition moins dure que les esclaves de l’époque gallo-romaine ; cependant ils étaient encore considérés juridiquement comme des choses et non connue des personnes. Quelques-uns étaient affectés au service personnel de leurs maîtres ; le plus grand nombre était attaché à la culture des terres, mais pouvait en être distrait.

Les colons composaient la classe la plus nombreuse des cultivateurs ; ils étaient inséparablement voués à la culture et liés au sol qu’ils exploitaient, au point de le suivre dans toutes ses mutations de propriété ; ils ne pouvaient ni le quitter de leur propre volonté, ni en être séparés par la volonté du maître. Leur tenure était héréditaire ; les services qu’ils devaient n’étaient pas arbitraires, mais fixés par la coutume ou la convention des parties ; ils pouvaient ester en justice. Leur situation présente beaucoup d’analogie avec le servage de la glèbe du XIe siècle. Le colonage disparut après les invasions normandes.

Les hommes libres étaient libres d’origine (ingenui) ou affranchis (liberti). Les plus notables s’appelaient nobiles optimates, mais il n’est pas probable que la noblesse fût déjà héréditaire.

Dans chaque plou, les nobles et les notables, sous le nom de