M. Combes peut se vanter d’avoir accompli une belle œuvre : à un pays qui avait besoin d’apaisement, il a donné la guerre civile. Si cette guerre n’est pas dans les faits, elle est dans les esprits et dans les consciences, ce qui ne vaut pas mieux. Mais n’est-elle pas dans les faits eux-mêmes ? Nous sommes déjà loin, bien qu’il soit presque d’hier, du discours que M. Combes prononçait à Pons, et dont nous parlions il y a quinze jours, il professait alors un optimisme béat, — qu’il nous pardonne le mot, — sur les conséquences de ses circulaires désormais fameuses. Il avait la satisfaction d’annoncer à ses auditeurs qu’il n’avait rencontré et qu’il ne rencontrerait nulle part de résistance. Tout avait plié docilement devant sa volonté. Mais, depuis, les événemens ont infligé à ses allégations des démentis éclatans.
Sans doute, les congrégations n’ont pas résisté ; elles se sont inclinées devant la force, et c’est le conseil que nous leur avons donné nous-même ; mais, en dehors d’elles, des protestations nombreuses, pressantes, éloquentes, se sont élevées ; l’ordre a été un moment en péril dans les rues de Paris ; enfin, au moment même où nous écrivons, l’émotion, l’indignation, l’opposition se sont traduites, dans certaines parties de la Bretagne, par cette résistance matérielle que M. Combes avait cru conjurer grâce à son seul prestige. La gendarmerie ne suffit déjà plus pour venir à bout du mouvement ; il a fallu recourir à la troupe, et on a vu nos pauvres petits soldats obligés de faire un service auquel ils ne s’attendaient guère le jour où ils ont été appelés sous les drapeaux. Le refus d’obéissance qu’un officier supérieur a opposé à l’ordre de ses chefs a été un incident plus pénible encore que tous les autres ; et, certes, on ne saurait excuser