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L'ÂME STYRIENNE ET SON INTERPRÈTE
PIERRE ROSEGGER

II[1]
L’ŒUVRE LITTÉRAIRE


V

Nous avons quitté Rosegger à l’heure décisive qui l’éloignait de sa forêt natale pour l’engager dans les sentiers ardus de la carrière littéraire.

Sur cette route difficile, son premier mouvement fut un faux pas, et sa tentative vers le métier des lettres parut devoir se clore par une péripétie analogue à celle qui avait anéanti jadis les espoirs ecclésiastiques des parens du petit Pierre. — En effet, malgré l’accueil cordial et véritablement paternel du libraire de Laybach qui était devenu son hôte, l’incorrigible idéaliste se sentit bientôt mordu au cœur par son mal héréditaire, le Heimweh. Ses paupières rougies, sa contenance lugubre disaient assez le combat qui se livrait en son âme, et qu’il s’efforçait courageusement à prolonger, par égard pour la bonté de ses hôtes. Mais, certain jour, tandis qu’il feuilletait l’un de ces livres que ses fonctions lui prescrivaient alors de manier et de ranger sans cesse, et qui semblaient cependant avoir perdu tout charme à ses yeux depuis qu’ils poussaient en foule autour de lui, comme

  1. Voyez la Revue du 15 novembre.