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aussi un élève des Jésuites. Son père, Guillaume V, s’était démis en sa faveur, et il avait pris la couronne ducale, en 1598, a l’âge de vingt-cinq ans ; c’était un homme svelte, au long nez, les cheveux bouclés, une tête à la don Quichotte, des yeux perçans et pleins de flamme ; d’une piété insigne, il s’était, par un engagement écrit de son sang et qu’il portait toujours sur lui, dévoué à la Vierge. Ses mœurs étaient pures ; il n’aimait guère, sur terre, que les affaires, les fleurs et la chasse. Dans toute la force du terme, un homme d’action ; instruit, de jugement prompt et décidé, il était excellent au conseil, excellent à la guerre, écoulant, consultant, mais se décidant par lui-même. Comme sa famille et comme la Bavière tout entière, il restait fortement attaché au catholicisme ; cependant, il était toujours disposé à accueillir les ouvertures d’où qu’elles vinssent et à prendre des voies diverses pour arriver à ses fins qui étaient immuables : en cela, excellent élève des Jésuites.

Tout l’effort du protestantisme n’en consista pas moins à essayer de le détacher des Habsbourg, par l’alléchante tentation de la couronne impériale. Il n’était pas électeur ; mais son frère, l’électeur de Cologne, lui eût donné sa voix. Si, en outre, les trois électeurs protestans votaient pour lui, l’élection était faite. Il est vrai qu’il était le propre beau-frère de Ferdinand de Styrie. On eût passé outre. Mais, — et c’était là le principal et véritable obstacle, — ses desseins et ses ambitions étaient ailleurs.

Il ne se nourrissait pas de fumée. Avec son camarade Tilly, qui n’était pas non plus un songe-creux, il armait et se tenait prêt pour intervenir, au besoin, dans les grands mouvemens qu’il était facile de prévoir. En 1609, il s’était mis à la tête de la Ligue catholique allemande constituée spécialement pour défendre le catholicisme contre l’Union protestante. Ainsi, il était exactement à l’opposite de son voisin, le comte palatin. Or, celui-ci, suivant l’idée de détruire l’unité du parti catholique, ne cessait de le harceler pour lui offrir la couronne impériale. Il accueillait d’un sourire le bouillant jeune homme et le laissait dire, pensant, à part lui, que la dignité électorale de Frédéric V et même tout ou partie du Palatinat feraient parfaitement son affaire. Ainsi, tandis que le Palatin s’employait si activement à le faire élire empereur, il ne songeait qu’à dépouiller le Palatin. Jamais, le chat n’a joué plus froidement avec la souris.

Maximilien de Bavière était trop bien renseigné sur les pensées