à tous les étrangers. Le contact, qui n’a jamais cessé d’exister sur les côtes, dans les Presidios, entre les deux peuples, n’a fait que raviver et envenimer les rancunes réciproques.
Quand les rois catholiques eurent achevé d’unifier l’Espagne et atteint ses frontières géographiques, il y eut, dans sa destinée une heure d’indécision. Quelle politique allait remporter, la croisade nationale qui entraînerait au-delà du détroit les successeurs d’Isabelle et de Ferdinand, à la poursuite des Maures vaincus, ou la politique dynastique qui jetterait l’Espagne hors de ses voies traditionnelles, dans des luttes sans finaux Pays-Bas, en Allemagne, en Italie ? Le monde put croire, un moment, que Charles-Quint et Philippe II seraient de taille à conduire de front la double bataille et à justifier une domination universelle par une lutte sans repos contre les ennemis de la chrétienté ; mais, à cette trop lourde tâche, les énergies de l’Espagne s’épuisèrent ; la guerre contre le Maure ne fut plus qu’un épisode secondaire et passager de son histoire ; les rois catholiques, peu à peu, en vinrent à d’humiliantes négociations avec le sultan et l’on vit Charles II envoyer un grand d’Espagne à Meknez pour obtenir du Chérif qu’il n’inquiétât pas les galions chargés d’or et d’épices, à leur retour des Amériques ! Chaque fois que l’idée de la croisade nationale, profondément enracinée dans l’âme du peuple espagnol, sembla réapparaître, des querelles européennes vinrent distraire l’attention de l’Espagne et paralyser son effort. Mais, des luttes d’autrefois, les Espagnols ont gardé quelques postes fortifiés sur les côtes du Maghreb, Ceuta et les Presidios, qu’ils regardent comme les têtes de pont qui leur permettront, un jour, de reprendre, la guerre sainte contre l’Islam. Les hommes qui ont eu le sens de la tradition nationale, un penseur comme Donoso Cortès, des généraux comme O’Donnell et Prim, ont tenté d’orienter l’Espagne vers cette politique. O’Donnell, en 1859, a réalisé un moment la réconciliation de tous les partis dans un même sentiment patriotique, quand il a conduit la grande expédition qui s’empara de Tetuan ; il se produisit alors une explosion du sentiment national, qui montra combien est populaire encore la guerre contre l’ennemi héréditaire.
Depuis la perte des colonies surtout, des hommes d’Etat, des publicistes, des géographes ont tenté de répandre cette idée que l’activité nationale, délivrée du poids mort des Antilles et des Philippines, doit se porter vers le Maroc ; ils espèrent faire renaître