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La dévotion à Sainte-Barbe et la construction de cette chapelle à elle dédiée dans l’église de Saint-Jean de l’Hôpital ont certainement pour origine la venue à Valence de la basilissa fugitive. Voici le récit du marquis de Cruilles, un des meilleurs historiens de Valence : « L’impératrice Constance fut atteinte de la lèpre, et les auteurs sont d’accord pour déclarer que sainte Barbe, à laquelle elle avait voué un culte spécial durant son long séjour en Asie, lui apparut un jour pour la guérir. Au même moment, son écuyer, qui passait à cheval dans une rue voisine, vit tout à coup la bête s’arrêter et lever la tête en semblant indiquer du pied un endroit de la rue. On fit des fouilles en ce point et on y découvrit une image de la sainte. On assure même que l’on plongea cette image dans trois bassins remplis d’eau et que l’impératrice, s’en étant lavée, se trouva miraculeusement guérie. En témoignage de gratitude, elle fit bâtir cette chapelle en l’honneur de la sainte à l’endroit précis où la statue avait été découverte. Elle voulut qu’on l’y enterrât après sa mort. »

La dépouille de la nonne-impératrice, retirée du sarcophage primitif, fut sans doute déposée, lors de la restauration de la chapelle, dans la place qu’elle occupe aujourd’hui, dans cette triste et modeste cassette de bois, « contre la partie supérieure du mur de gauche en entrant, » ainsi que le dit fort exactement le Père Villanueva. C’est alors certainement qu’on inscrivit sur cette cassette la misérable inscription que j’ai citée.

La première pierre de cette restauration déplorable fut posée solennellement, dans l’après-midi de la journée du lundi 19 mars 1685 par le Dr Don Francisco Orts, membre du Conseil Royal. À cette même place, on aperçoit aujourd’hui encore un petit tableau contemporain représentant la découverte de la sainte image et la guérison miraculeuse de la basilissa, encore jeune et belle, agenouillée devant la glorieuse sainte debout auprès de sa tour. Détail piquant, la fille des empereurs, l’épouse illustre du basileus de Nicée, y est représentée sous le pittoresque costume des femmes du peuple de Valence ! On conserve dans une niche du même côté, dans un bénitier en pierre, un fragment du roc d’où jaillit l’eau pour le baptême de sainte Barbe à Nicomédie, fragment rapporté d’Asie par la pieuse souveraine comme une relique d’un prix inestimable. « On attribuait, dit encore le Père Villanueva, à l’eau dans laquelle trempait ce fragment, une puissance miraculeuse pour guérir de diverses maladies ceux qui