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Au Ve siècle, les invasions barbares avaient donné l’Elbe et la ligne des Alpes pour limite orientale à la race allemande. Sur cette longue frontière, elle touchait à des populations slaves, séparées eu tronçons inégaux par le cours du Danube, le long duquel s’était produite une coulée de race finnoise. La dynastie saxonne franchit l’Elbe ; avec elle commença la pénétration germanique, qui, se faisant l’agent de la rénovation spirituelle des populations païennes, entreprit, en même temps, de les germaniser et de les christianiser. Dès le VIIIe siècle, l’archevêché de Salzbourg s’était mis à travailler les Slovènes, l’évêché de Passau les Hongrois, celui de Ratisbonne les Tchèques ; le siège de Magdebourg s’attaquait aux Wendes, puis aux Polonais ; celui de Brème ouvrait la mer à ses missionnaires, qui prirent pied dans les provinces Baltiques. A l’évangélisation succéda la croisade, qui submergea la Prusse et installa sur la Vistule l’ordre teutonique.

La conversion, en temps utile, des Tchèques, des Hongrois et des Polonais, leur épargna la croisade germanique ; d’autre part, ils étaient, dès l’origine, constitués en groupes assez compacts pour éviter l’annihilation, réservée à la poussière des peuples Wendes. Ils n’échappèrent pas toutefois aux prétentions allemandes, quant au droit du Saint-Empire de dispenser et de garantir les couronnes ; ils ne purent davantage se soustraire à une lente infiltration germanique. L’Église, dans laquelle le germanisme avait acquis une prise solide, se mit à diriger les premiers essais de la culture et des institutions nationales ; les mariages fréquens des princesses allemandes tendirent à germaniser les cours et surtout la noblesse. A partir du XIIe siècle, provoqué par l’esprit de croisade, se produisit un nombreux déplacement de populations allemandes ; des colons lurent pris en masse dans l’inépuisable réservoir de la race, constitué par le pays du Rhin, pour être transportés dans les régions nouvellement ouvertes à l’expansion germanique. Le mouvement de colonisation déborda pareillement sur la Bohême, la Pologne et la Hongrie : des communautés allemandes de négocians et d’artisans y furent attirées dans les villes, et reçurent des privilèges destinés à les soustraire à la juridiction locale, les rois de Hongrie formèrent, au sud de la Transylvanie, une marche saxonne ; Prague et Pesth devinrent des villes allemandes. Dans le même temps, la recrudescence de ferveur catholique entraînait l’expulsion