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adresser de nombreuses protestations au Conseil de comté de Londres, qui, depuis 1889, centralise les grandes questions de l’administration urbaine.

Il est juste de dire que l’approvisionnement régulier de plus de 6 millions d’êtres humains et de plusieurs centaines de mille chevaux ou autres animaux domestiques, espacés sur 45 000 hectares, n’est pas précisément chose simple et aisée ; mais on a supporté à Londres des inégalités de service qu’on n’eût pas si longtemps tolérées en France.

La population de Londres a protesté contre les inégalités d’abondance qui font que toutes les compagnies ne fournissent pas, par tête, les mêmes quantités d’eau pour un prix analogue ; qu’en été les compagnies desservant les quartiers de l’Est laissent leur clientèle absolument privée d’eau pendant de longues périodes. Elle a également protesté contre les inégalités de qualité, car telle région reçoit les eaux fraîches et agréables tirées des puits artésiens, pendant que le quartier voisin n’a que les eaux tièdes et douteuses de la Tamise.

Une transformation du système, ayant pour but la recherche de sources éloignées, notamment dans la région montueuse du pays de Galles, fut envisagée en même temps que la remise du service des eaux au Conseil de comté. Ce dernier a demandé au Parlement l’autorisation de racheter les ouvrages et les canalisations des compagnies et d’exploiter le service des eaux.

Au mois de mai 1897, le gouvernement, peu favorable en principe à cette demande, institua néanmoins une commission royale pour l’étudier. Après une laborieuse enquête, au cours de laquelle sir A. Binnie, ingénieur en chef du Conseil de comté de Londres, développa ses plans de dérivation et ses projets de réorganisation, lord Llandaff, président de la commission, proposa le rejet de cette demande, que le Parlement écarta. Toutefois il signala la nécessité d’établir entre les réservoirs, alors séparés, une canalisation permettant aux diverses compagnies de se prêter assistance pour alimenter les quartiers habituellement dépourvus aux jours d’été, ce que les compagnies ont immédiatement réalisé, car elles se sentent sérieusement menacées dans un avenir plus ou moins éloigné. En effet, la solution finale préconisée par la Commission royale, et agréée en principe par le Parlement, c’est le transfert du service des eaux de Londres à une administration publique spéciale, à créer, formée de trente