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Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 9.djvu/638

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REVUE DES DEUX MONDES.

respectent ou l’abattent, au gré des saisons qui le dessèchent ou le vivifient… Il faut chercher ailleurs l’île d’Ulysse et les deux ports d’Alkinoos.

Autre site. Nos marines récentes et déjà les marines de l’antiquité gréco-romaine, naviguant dans le détroit de Corfou, avaient au bord du grand canal adriatique un dernier reposoir. Le temple de Zeus Kasios et l’église de Notre-Dame de Cassopo s’y sont succédé. C’est la station antique de Kassiopè, la station moderne de Kassopè ou Cassopo. Une forteresse vénitienne couronne encore le promontoire qui, de toutes parts entouré d’eau, ne tient à la côte que par un isthme étroit : « La pointe Cassopo porte les ruines d’une belle forteresse vénitienne. La côte Ouest forme la baie d’Aprau, où il y a mouillage par des fonds de 20 à 35 mètres par les vents de terre, avec le petit port Cassopetto qui a 7 mètres d’eau. Ces localités ne sont guère fréquentées que par les pêcheurs. » La côte Est du promontoire de Cassopo longe une autre crique en cul-de-sac, un fjord étroit que les Instructions ne mentionnent même pas. Dans ces deux mouillages de Cassopo on a voulu pourtant reconnaître les beaux ports d’Alkinoos. Même en négligeant la moitié des mots, on ne peut appliquer ici le texte homérique.

D’ailleurs, prenez Korkyre, Kassopo, ou tout autre mouillage sur les côtes de l’île qui bordent le détroit : aucun site de ces côtes orientales ne saurait nous offrir les autres traits du site odysséen. Où sont les falaises abruptes, les rochers nus, les écueils grondans et le fleuve au fond d’une crique ? Au long de sa côte orientale, l’île ne présente aux navigateurs du détroit que des plages de sable ou de vase et des pentes longues de roches ou de cailloux. Les montagnes par endroits dominent la rive, mais elles ne plongent jamais abruptes dans la mer. Tout au long de ce détroit corfiote, j’ai vainement cherché les vues de côtes odysséennes (avril-mai 1901). Les plages sablonneuses du Sud ne sauraient être mises en cause. Les pentes boisées du centre ne conviennent pas mieux. Ce sont de rapides talus, coupés de ravins, semés de pierres roulantes et de rochers, mais vêtus d’oliviers, de cyprès et de broussailles, et n’offrant jamais une façade abrupte. Puis viennent les marais et les vases qui encerclent les promontoires de la ville ancienne et de la ville moderne ; les pentes d’oliviers et de vignes où les talus d’herbages et d’aloès descendent jusqu’à la bordure de vases. Au Nord de la