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des habitans qui ont péri est considérable. L’ébranlement sismique a persisté pendant une semaine au Guatemala et s’est étendu au Honduras, au Salvador et au Nicaragua.

Le 6 mai, le phénomène se manifestait en France et en Espagne. M. Kilian le notait à Grenoble ; un autre observateur le signalait à Floirac, près de Bordeaux. Des mesures précises ont permis d’en déterminer l’épicentre, c’est-à-dire de connaître le point de départ de l’ébranlement. M. Michel Lévy le place en pleine Méditerranée, un peu au sud de l’île de Minorque. Il s’est produit là, dans le sous-sol marin, quelque fracture dont l’ébranlement constaté n’est que la conséquence. Le maximum de violence a été atteint à Murcie, en Espagne. Ce n’est naturellement pas la première fois que l’on constate cette solidarité des manifestations volcaniques ou sismiques dans les Antilles et dans la région méditerranéenne, particulièrement dans la province de Murcie. Elle a été notée en 1819. Elle l’a été surtout en 1756, lors du grand tremblement de terre de Lisbonne : le 1er novembre 1756, quatre heures après ce cataclysme formidable, le contre-coup en était ressenti à la Trinité et à la Martinique.

La série des perturbations se continua, le 13 mai, au Mexique, par une recrudescence volcanique du Pico da Colima. Le lendemain, 14 mai, une secousse assez intense était observée dans la région pyrénéenne, à Oloron. Enfin, tout récemment, le 25 mai, une dépêche annonçait un tremblement assez violent à Temesvar, en Hongrie. C’est dans cette série d’accidens volcaniques et sismiques, dont la liaison et le caractère de généralité sont évidens, que s’intercale l’éruption de la Martinique et, plus au sud, dans la même série des petites Antilles, de l’île anglaise de Saint-Vincent des Barbades.

Les récens événemens justifient donc la solidarité géologique des divers compartimens de la Méditerranée primitive. D’ailleurs la mer actuelle des Antilles offre la plus grande analogie de structure et de composition sédimentaire avec la Méditerranée occidentale. C’est un bassin ovalaire. Il est séparé, au nord-ouest, du golfe du Mexique par la presqu’île du Yucatan et la grande île de Cuba : il est isolé vers l’est de l’Atlantique précisément par la triple ceinture des autres îles. L’isthme américain, depuis la pointe du Yukatan jusqu’à la Guyane, forme son rivage occidental et méridional ; l’arc circulaire des Antilles, son bord oriental.

Ces îles, comme l’avait déjà observé Léopold de Buch, et comme Suess l’a montré plus clairement encore, forment trois séries concentriques. La rangée la plus interne est exclusivement volcanique. Elle