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coupé les communications des Anglais avec la mer, par où ils recevaient leurs approvisionnemens. Mais la place était forte, le siège eût été long. Le Duc de Bourgogne ne fut pas d’avis de l’entreprendre. De nouveau, il fallut en référer au Roi, envoyer un courrier à Versailles et attendre la réponse. Le Roi conseilla de bloquer seulement Oudenarde avec un cordon de troupes, pensant, non sans quelque raison, à ce qu’il peut paraître, qu’il était préférable de ne pas immobiliser toute l’armée autour d’une ville, et d’en conserver le plus gros pour quelque action plus décisive. Mais le temps que ces tergiversations firent perdre à l’armée française avait été employé par Marlborough et le Prince Eugène d’une façon singulièrement utile. Au lieu d’attaquer l’armée française dans ses positions nouvelles, ils la tournèrent. Partis le 7 de Bruxelles, ils écornèrent son arrière-garde dans une affaire peu importante, et, passant entre son ancien campement de Braine-l’Alleud et son nouveau campement sur les bords de l’Escaut, ils vinrent, par une marche rapide, occuper, le 10, la forte position de Lessines, à six lieues d’Oudenarde, et à peu de distance de la frontière française. L’armée du Duc de Bourgogne, par cette manœuvre hardie qui échappa complètement à Vendôme, se trouvait coupée de sa base d’opérations, et il en résultait cette situation singulière que l’armée anglo-hollandaise avait à dos la France, et que l’armée française avait à dos la Hollande.

Ni l’une ni l’autre armée ne pouvait demeurer dans une situation également périlleuse pour chacune. Une attaque, à laquelle aucun des deux adversaires ne cherchait du reste à se dérober, devenait inévitable. Elle eut lieu le 11 juillet, mais sans plan arrêté d’avance, plutôt par l’effet d’une rencontre fortuite que par une attaque préméditée, et, à ce point de vue, le Mercure, rendant compte de l’affaire, a raison de dire que ce fut plutôt un combat qu’une bataille.

Le 11 juillet, l’armée française et l’armée Hollandaise se trouvaient donc toutes deux sur les bords de l’Escaut, qu’elles se préparaient à passer parallèlement en quelque sorte, à deux lieues et demie de distance, chacune ignorant les desseins de l’autre ; mais, pour la seconde fois, Vendôme se laissa gagner de vitesse par Marlborough. De même qu’il avait mis à faire cinq ou six lieues autant de temps que Marlborough à en faire treize, de même il se laissa devancer au passage de l’Escaut le 11 au matin,