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le commandant du 10e corps réunit tout ce qu’il trouve de cavalerie, soit 6 régimens (4e cuirassiers, 13e, 16e et 19e dragons, 13e uhlans, 10e hussards) et les jette sur le même nombre de régimens français : 2e et 7e hussards, 3e dragons, lanciers et dragons de la garde, 2e chasseurs d’Afrique. Il en résulte une mêlée, sur l’issue de laquelle personne ne s’est jamais mis d’accord, chaque parti s’étant attribué le succès final, mais dont le résultat n’eut absolument aucune influence sur le développement de la bataille.

Enfin, à la tombée de la nuit (8 heures du soir), le prince Frédéric-Charles ordonna une nouvelle attaque de cavalerie sur Rezonville et lança à la charge deux brigades de la 6e division de cavalerie entre Vionville et Flavigny (3e et 15e uhlans, 6e cuirassiers, 9e et 12e dragons, 16e hussards). Cette cavalerie ne put même pas se déployer. Le résultat fut désastreux.

En employant leur cavalerie, les Allemands étaient ce jour-là logiques, puisqu’ils n’avaient encore en ligne que fort peu d’infanterie et qu’il fallait soutenir leur déploiement d’artillerie. Mais si l’idée était juste, les procédés d’exécution furent déplorables, parce que les charges seules furent employées. Elles n’aboutirent qu’à des pertes cruelles.

C’est à tort que quelques-uns de leurs écrivains ont attribué à l’action de la cavalerie notre retraite sur Metz. Nous nous sommes retirés parce que ce mouvement répondait au plan de Bazaine.

De notre côté, l’emploi de la cavalerie fut aussi mauvais et les résultats encore plus tristes.

A Sedan, notre meilleur général de cavalerie, Margueritte, ayant été mortellement blessé en reconnaissant le terrain de la première charge, aucune d’elles n’est arrivée jusqu’aux lignes prussiennes. « Le feu de quelques batteries et d’un petit nombre de compagnies, » disent les Allemands, « firent échouer tous les efforts de cette division, dont toute la bravoure succomba sous le feu rapide. »

Néanmoins, cette charge fut justifiée.

De toute la campagne, c’est même la seule qui eut sa raison d’être.

Il ne s’agissait pas de rétablir une situation irrémédiablement perdue, mais bien d’avoir l’honneur sauf. Dans de telles conditions, la course à la mort est un devoir.