Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 13.djvu/122

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Rôdez, cherchez, tâtez et, si vous trouvez chez l’ennemi un point faible, lancez-vous, votre heure est arrivée.

L’officier part et la masse des escadrons le suit de loin, d’abri en abri. De tous les côtés s’élancent des officiers éclaireurs, montés sur des chevaux de sang. En quête d’occasions, ils apportent au général, dans des va-et-vient rapides, des renseignemens ou impressions, qui ne sont pas toujours favorables. Ici, le terrain est impossible ; là, l’ennemi est sur ses gardes et ne paraît pas ébranlé.

Tout à coup, guidé par un officier, le général, d’un galop allongé, gagne un point d’observation. Oui, c’est l’endroit et le moment

En avant !

Les régimens quittent leur dernier abri. Ils traversent au trot, par des évolutions simples et souples, les encombremens inévitables derrière une armée qui se bat. — Enfin les lignes amies sont franchies, et l’on prend le galop. Au galop, pendant des kilomètres, au galop allongé à travers l’infanterie, l’artillerie, les obstacles de tous genres, au galop, jusqu’à ce que tout soit traversé, car il faut s’emparer des défilés sur les lignes de retraite.

La trouée est faite, l’événement est produit, la panique est amorcée, la victoire s’offre ; un dernier effort des autres armes, et elle est gagnée. »

C’est dans cet ordre d’idées qu’il faut envisager les charges que, depuis quelques années, l’Empereur allemand commande en personne à la fin des grandes manœuvres. Il tient à mettre en lumière ce fait, que la cavalerie reprend toute sa puissance comme arme à cheval, lorsque l’adversaire, démoralisé par une lutte qui a excédé ses forces, se met en retraite, en désordre. La cavalerie peut alors tout oser.

II est clair que dans une bataille, 50 ou 60 escadrons ne seraient pas réunis sur le même point. Là où 1 500 chevaux ne pénétreraient pas, 4 000 chevaux ne réussiraient pas davantage. Les groupes de cavalerie seraient en fait répartis sur tout le front du combat et agiraient sur les terrains convenables aux heures psychologiques. Si, dans les manœuvres, afin de donner des leçons qui frappent l’imagination, l’empereur Guillaume constitue des groupemens énormes, il ne s’ensuit pas que, dans la bataille, toute sa cavalerie serait formée en une seule masse,