Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 13.djvu/283

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Rollin, et avant tout dans la direction éclairée de son père, à la fois un stimulant et l’appui le plus précieux. Avocat à la Cour de cassation, maire du XIIIe arrondissement, député de Paris, si absorbé que fût M. Cochin père par ses travaux multiples, par les initiatives fécondes qu’il sut prendre dans le domaine des institutions scolaires et charitables, il suivait attentivement les progrès de son fils, dont il était le confident et l’ami.

Préoccupation devenue trop rare, M. Cochin entendait que son fils se préparât, d’abord par une culture générale, ensuite par des études spéciales, par des voyages, par des observations recueillies à l’étranger, à remplir dignement les hautes fonctions de la vie publique. Il était de ceux qui pensent que, chez un grand peuple, et là particulièrement où prévalent des courans démocratiques et égalitaires, il doit se former librement une élite capable d’administrer le pays. Il pensait que les hommes d’Etat ne s’improvisent pas, et il comprenait la démocratie comme l’entendait, aux Etats-Unis, l’illustre Jefferson lorsqu’il montrait en elle le meilleur moyen de conduire au pouvoir les supériorités naturelles. Il ne vit malheureusement pas l’application de ce programme ; mais il en avait pénétré l’esprit de son fils. Augustin Cochin alliait à une éducation littéraire très complète la connaissance des sciences naturelles et physiques. Docteur en droit, il possédait à fond la législation et l’économie politique. L’usage familier des langues étrangères lui permettait de tirer profit de tous ses voyages, d’apprendre à connaître le monde et la politique de son temps, d’étudier et de comparer les conditions industrielles, les finances des diverses nations. Mais le problème qui l’intéressa de meilleure heure et le plus profondément fut celui de l’éducation. Il avait eu occasion de l’approfondir en prenant part à un concours institué par l’Académie des sciences morales et politiques sur les doctrines de Pestalozzi[1]. Peut-être dut-il à la fréquentation de ce philosophe une de ses idées maîtresses, la conviction que la solution de toutes les questions vitales dépend de l’éducation, et que celle-ci a pour point de départ, pour fondement essentiel, la famille, le foyer domestique.

Lui-même, toutefois, fut de bonne heure privé du moyen de formation qu’il appréciait le plus. Sa mère était morte lorsqu’il

  1. Son mémoire fut couronné par l’Académie.